Le 1er bataillon muong.

Publié le 2 Novembre 2012

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Soldats du 1er bataillon Muong s’asseyant au mortier.

 

Incorporer des troupes locales.

 

Dès le début de la guerre d’Indochine se pose un double problème : faire face au manque d’effectifs et impliquer les populations locales pour, entre autres, bénéficier de leurs connaissances. Le général Leclerc fait donc appel en 1946 aux Indochinois et propose d’en incorporer dans le cadre du CEFEO : Corps Expéditionnaire Français d’Extrême-Orient.

 

Ainsi, des milliers d’hommes, venant principalement des minorités ethniques des montagnes du Tonkin, hostiles aux visées des partisans communistes, s’enrôlent dans cette armée française, et forment des Compagnies de Supplétifs Militaires. Ce ne sont pas les seuls coloniaux, car ils y retrouvent des Algériens, des Marocains et des Sénégalais.

 

Arrivé à la fin de l’année 1950, le général de Lattre de Tassigny théorise le concept et, en accord avec les autorités locales, monte une armée vietnamienne et des bataillons dans toutes les armes pour appuyer le CEFEO et doter le pays d’une force qui lui est propre.

 

Peuple des montagnes.

 

Les Muongs représentent la plus importante des 53 minorités ethniques reconnues aujourd’hui dans le cadre de la population du Vietnam. Ils sont environ 1,2 millions. Proches du peuple Thaï, ils ont subit l’influence des Chinois, que ce soit dans leurs coutumes ou dans leurs langues. Ils vivent dans les montagnes du nord du Vietnam, à l’ouest d’Hanoi, dans les provinces d’Hoa-Binh et de Thanh Hoa.

 

A l’époque, et c’est bien souvent le cas encore, ces minorités sont exclues des milieux d’affaires et des centres de décision de l’Indochine. Non pas particulièrement par les Européens, mais plutôt par le peuple vietnamien, habitant les plaines et les côtes du pays. Une haine s’est ainsi développée entre ces deux peuples au cours des siècles.

 

Aussi, leur incorporation aux côtés des troupes françaises s’en trouve facilitée.

 

Les bataillons Muong.

 

Reprenant les idées du général Leclerc, le général Alessandri – il est alors commandant en chef des forces en Extrême-Orient – propose un premier statut d’autonomie pour les Muongs. Il s’inspire du modèle retenu pour les Thaïs, autre peuple des montagnes du Tonkin. Dans un premier temps, il s’agit de rassembler des hommes, de leur confier un fusil – pas à tous – et de bénéficier, pour une solde moindre par rapport aux soldats de la métropole et aux autres coloniaux, de toutes les connaissances de ces hommes sur leur propre territoire.

 

Puis, le 1er mars 1950, le général Vanuxem – bientôt proche collaborateur du général de Lattre de Tassigny – créé le bataillon Muong. Une année plus tard, l’unité devient le 1er bataillon Muong et un 2ème bataillon est à son tour créé le 6 avril 1951.

 

Le 1er opère à Xom-Giam, Dao-Tu, et surtout à Vinh-Yen lors de la grande victoire du général. L’unité attaque un village à la baïonnette et après avoir mené de très durs combats, revient dans les lignes françaises en ramenant le corps de l’un de ses commandants de compagnie. Par la suite, il intervient dans la région de Hoa-Binh et libère celle de Bich-Du (Tonkin). Après la chute du camp retranché de Diên-Biên-Phù, le bataillon est dissous le 11 août 1954.

 

Quant au 2ème, il se signale à Phat Diem, Tri Le et également Bich Du. Le 24 décembre 1952, l’unité attaque le village de Nghi Xa. Les combats de ne cessent de la journée et de la nuit. Ils vont jusqu’au corps à corps. Au lendemain, le 2ème se reforme à l’arrière. A l’Etat-major on apprend qu’il a, à lui tout seul, stoppé puis anéanti l’équivalent d’un bataillon vietminh. Plus tard, fort de cette réputation, le 2ème est dissous pour devenir 73ème bataillon de l’Armée nationale vietnamienne.

 

Les soldats Muongs sont particulièrement efficaces dans leur région d’origine et ils permettent bien souvent de repérer avant tout le monde la présence des forces du Vietminh. Ce sont des éclaireurs de premier ordre. Ils savent approcher l’ennemi sans se faire repérer. Ils connaissent chaque parcelle du district d’Hoa-Binh. C’est évidemment moins le cas lorsqu’il s’agit pour eux de faire la guerre loin de leur territoire et selon des conventions qui sont imposées par certains officiers, pour qui « il n’est de guerre que celle qui est enseignée à Saint-Cyr ! ».

 

 

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Le fanion du 1er Bataillon Muong est décoré par le général de Lattre de Tassigny après la bataille de Vinh Yen (document ECPAD).

 

Les combats de Décembre 1953.

 

Emile Maurice Magnaval nait le 5 juin 1920 dans le 15ème arrondissement de Paris. Habitant Issy-les-Moulineaux, il s’engage dans l’armée par un bureau de recrutement du département de la Seine. Puis, il suit une école d’officier et, volontaire pour l’Indochine, fait son apprentissage dans le 1er bataillon Muong, alors basé au Tonkin.

 

Novembre 1953. L’Etat-major du CEFEO est entièrement tourné vers son objectif de l’Opération Castor : attirer un maximum de régiments du Vietminh dans la cuvette de Diên-Biên-Phù pour les battre, et faire plier définitivement l’armée du général Giap et d’Hô Chi Minh. Pour autant, partout au Tonkin, des combats sporadiques et des embuscades subsistent. Dans la région de Ninh Binh par exemple, située à quelques 300 kilomètres au sud d’Hanoi.

 

Ainsi, à la tête de sa compagnie, Emile Magnaval trouve la mort au front, le 18 décembre 1953, entre Nam Than et Nam Buang. Après la défaite de Diên-Biên-Phù – 7 mai 1954 – et les accords de Genève, les Français survivants des camps du Vietminh sont libérés courant septembre de la même année. Beaucoup de corps sont rapatriés en métropole. C’est le cas d’Emile Magnaval, dont les restes reposent dans la crypte se trouvant sous le monument aux morts du cimetière municipal.

 

Il est à noter qu’Emile Magnaval avait également des attaches à Courbevoie, car son nom figure sur le monument aux morts de cette commune.

 

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Soldats du 1er Bataillon Muong.

 

Sources :

 

 

  • - Patrice Gélinet, émission de France Inter 2000 ans d’Histoire : Indochine 1945-1954, histoire d’une guerre oubliée.
  • - Général Bigeard, Ma vie pour la France, Ed. du Rocher, 2010.
  • - Georges Fleury, La guerre en Indochine, Tempus, Perrin, 2003 et Nous, les combattants d’Indochine, Bourin Editeur, 2011.
  • - Michel Bodin, Dictionnaire de la guerre d’Indochine, 1945-1954, Economica, 2004.
  • - Michel Bodin, La France et ses soldats, Indochine 1945-1954.
  • - Gérard Brett, Les supplétifs en Indochine, L’Harmattan, 1996.
  • - Site de l’association des Anciens combattants et des Amis de l’Indochine : www.anai-asso.org (dont article écrit par le colonel Maurice Rives).
  • - Bibliothèque et photothèque de l’ECPAD.

 

Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #Indochine

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