Publié le 27 Novembre 2022

Officiers du 139e RI.

Officiers du 139e RI.

De la Corse à Aurillac.

Vincent Saliceti nait à Vescovato, petit village de Haute-Corse, le 1er juin 1866. Il est le fils d’Eugène Saliceti et de Marie-Louise Paoli.

Militaire de carrière, il fait partie des officiers du 139e régiment d’infanterie à la déclaration de guerre en août 1914. Cette unité, basée à Aurillac et Lyon, est alors commandée par le colonel Mienville, avec 60 officiers et 3.300 hommes. Pendant la Grande guerre, le régiment va combattre dans les Vosges, puis dans la Somme (il perd 50 officiers et 1.600 hommes !), en Belgique, à Verdun où il enlève la Côte 304 ! De retour à Aurillac en août 1918, l’unité est dissoute à la fin de l’année avant de renaître une dernière fois en 1939. Renaissance éphémère car il est de nouveau dissous en 1940.

Les archives d’Aurillac montrent l’importance de la présence de 1.500 soldats (la caserne de Lyon abrite l’autre moitié du régiment) dans une petite ville de 16.000 habitants. L’impact économique est important en termes de commerces, de cafés, pour les écoles et la vie en général. La musique du régiment est présente sous le kiosque du parc municipal le dimanche, les cérémonies patriotiques revêtent une grandeur évidente avec le défilé des troupes dans les ruelles d’Aurillac et la population est fière de ses militaires, quand bien même parfois il ne fait pas bon à se trouver à la sortie des bistrots en fin de soirée, quand le vin a fait tourner la tête à quelques bidasses !

 

Aux hôpitaux temporaires.

En 1914, les hôpitaux militaires parisiens sont le Val de Grâce (Paris), Villemin (situé dans le couvent des Récollets, Paris 10e), Bégin (Saint-Mandé) et Dominique Larrey (Versailles). Ils sont relayés par d’autres hôpitaux, des cliniques, des dispensaires, des fondations et des maisons de santé.

Ainsi, à Issy, les hôpitaux temporaires de l’école Saint-Nicolas, des Petits Ménages et des Sœurs de Saint-Thomas dépendent tous de Dominique Larrey.

A la tête d’une compagnie du 139e RI, le capitaine Vincent Saliceti a participé aux batailles de 1914 dont la « course à la mer », les Flandres, la Somme et Verdun pendant toute l’année 1916. Cependant, il contracte en service une aortite, c’est-à-dire une inflammation de l’aorte, l’artère la plus importante du corps humain puisqu’elle part du ventricule gauche du cœur et s’étend jusqu’à l’abdomen en apportant à presque toutes les parties du corps du sang oxygéné.

Le capitaine Saliceti meurt le 29 janvier 1917 à l’hôpital temporaire du lycée Voltaire dans le 11e arrondissement, loin de ses hommes et de sa Corse natale. Son corps est inhumé au carré militaire d’Issy-les-Moulineaux. Il avait cinquante ans.

Au même moment, le 139e régiment d’infanterie reçoit une citation à l’Ordre du 10e Corps d’Armée qui sera transformée en une citation à l’Ordre de l’Armée : « le 4 septembre 1916, sous le commandement du colonel Mienville, s’est porté à l’attaque dans un ordre parfait, a enlevé dans un élan irrésistible malgré le violent bombardement, six lignes ennemies de tranchées, sur lesquelles il s’est installé- définitivement après avoir réduit brillamment plusieurs îlots ; a fait plus de 250 prisonniers, et s’être emparé d’un matériel de guerre important ; dont plusieurs mitrailleuses et une dizaine de canons de tranchées ».

 

Sources :

  • Site France Archives.
  • Site Memorial Gen Web – Contributions de Ghislaine Loupforest, Patrick Caulé et Laetitia Filippi.
  • Archives du comité d’Issy-les-Moulineaux du Souvenir Français.
  • Archives de Vescovato en Corse.
  • Site Chtimiste sur les unités engagées pendant la Première Guerre mondiale.

 

Le village de Vescovato en Corse.

Le village de Vescovato en Corse.

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Publié le 20 Novembre 2022

« Mon retour d’Afghanistan », par l’adjudant Lavaud, aide-soignant principal.

L’aide-soignant principal, l’adjudant Fabien Lavaud, a été pendant sept ans le trésorier de notre comité du Souvenir Français, avant d’être muté à l’hôpital militaire de Toulon. Avant son départ pour le Var, Fabien a accepté de nous parler de son expérience d’opération extérieure (OPEX) en Afghanistan.

 

« Je voudrais témoigner de mon expérience d’OPEX en Afghanistan en 2011. Cette opération m’a beaucoup marqué. J’y pense souvent, et, heureusement, nous avons, avec quelques camarades, formé une équipe d’amis proches, ce qui nous permet de nous revoir a minima chaque année et de passer du bon temps ensemble. Pour oublier ce qui fut.

J’ai passé trois mois, du 28 juin au 5 octobre 2011, à l’hôpital de Kaia à Kaboul. Cette expérience fut riche en activités mais aussi en dureté. J’y étais affecté en tant qu’aide-soignant militaire en service de réanimation. Cette OPEX n’était pas ma première (j’avais déjà fait un séjour en Côte d’Ivoire) et, avec le recul, heureusement.

Au cours de notre mandat, douze militaires français ont été tués : trois capitaines (1er RCP, 152e RI, 17e RGP), un second-maître du commando Jaubert, cinq sous-officiers et trois militaires du rang. Pratiquement tous tués dans la vallée de la Kapisa, à environ cent-dix kilomètres au nord-est de Kaboul, là où se trouvait le Groupement tactique interarmes. Et nous avons eu, toujours au cours de la même période, autant de blessés graves (plaies par balles, amputations…), transférés pour la plupart en moins de 24 heures sur les HIA (Hôpitaux d’Instruction des Armées) en France. La chaîne opérationnelle pour les évacuations sanitaires a très bien fonctionné avec ses différents plans (MASCAL (1) ou MORPHEE (2) selon les circonstances).

Cette mission reste pour ma part la plus dure, avec un contexte de guerre permanent. Au début, de notre camp à l’aéroport de Kaboul, elle – la guerre – restait un peu éloignée. Cependant, dès l’arrivée des blessés et décédés, elle était là… avec les cris, les pleurs, les odeurs. Nous la prenions en pleine figure.

Grâce à la qualité humaine de nos officiers et de toute l’équipe, au sens du devoir de chacun, le dévouement était en nous. C’était essentiel car plus le temps avançait et plus nous étions sous pression du fait des attaques, des attentats, des IED (3). En fait, nous recevions beaucoup d’informations. Et même quand le problème ne nous concernait pas, nous le prenions comme un élément d’une chappe de plomb.

L’hôpital fonctionnait avec une cinquantaine de lits et les services suivants : trois salles de blocs, un service d’urgence, un service de réanimation, un de chirurgie, la radiologie et un scanner, ainsi que des consultations pour la population Afghane.

Un élément est important : les équipes de soignants étaient accompagnées, pour le fonctionnement et la logistique, par le régiment médical de La Valbonne (Ain) qui a largement contribué au bon rouage dans les équipes et les cérémonies. Je veux leur dire merci et leur présenter tout mon respect.

Mon grand regret est de n’avoir pas tenu un carnet de bord lors de cette opération extérieure. Cependant, rien ne s’oublie et c’est pour cela que nous devons témoigner de ce qu’est la guerre, de ce qu’elle représente. Il s’agit de transmettre pour notre mémoire collective.

Cette mission m’a douloureusement marqué. Mais les équipes sont soudées, unies, et parler n’est pas une honte. C’est ce qui fait notre force, notre richesse au sein du Service de Santé des Armées ».

 

Aide-soignant principal LAVAUD Fabien.

 

  1. MASCAL : Massive Casualties – Extraction des blessés, leur transport, triage, soins de sauvetages au combat prodigués dans les différentes zones et à l’entrée au bloc opératoire.
  2. MORPHEE : Module de Réanimation pour Patient à Hautes Elongation d’Evacuation – Mise en œuvre d’un hôpital mobile avec du matériel médical directement dans la soute d’un avion ravitailleur.
  3. IED : Improvised Explosive DeviceEngin explosif improvisé.

 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié le 3 Novembre 2022

Carte des Morts pour la France, 1914/1918, mairie de Vievy-le-Rayé (Loir-et-Cher).

Carte des Morts pour la France, 1914/1918, mairie de Vievy-le-Rayé (Loir-et-Cher).

En France, la moitié de nos communes ne dépassent pas les cinq cents habitants, tout en ne rassemblant seulement que 6% de la population.

 

C'est le cas de Viévy-le-Rayé, un village situé dans le sud de la Beauce, entre Châteaudun et Blois. Avec son petit site archéologique, les restes de sa tour médiévale et son église du 12e siècle, c'est une commune typique de ces agglomérations qui, fières de leur participation à l'histoire de notre pays, n'oublient pas d'honorer, en inscrivant leurs noms sur le monument aux morts, la mémoire de leurs enfants morts au champ d'honneur pour la défense de la patrie, dont à Vievy, en particulier, les quinze victimes des combats de la Première Guerre mondiale.

 

Le village comptait, en 1914, environ quatre cents habitants. Dans cette contrée agricole, on peut estimer à une moyenne de sept le nombre de personnes par foyer en comptant une famille, père, mère et deux ou trois enfants, un ou deux « anciens », une cousine célibataire ou un oncle veuf... et donc, selon l'ancienne définition, environ une soixantaine de « feux ». C'est-à-dire qu'un foyer sur quatre n'a pas vu revenir le père, le fils ou le frère de cette hécatombe qui a coûté 1.400.000 soldats à notre pays.

 

Il se trouve que j'assistais, au début de l'été, à un mariage familial dans la petite salle de réunion de la mairie de Vievy-le-Rayé. Sur le mur, derrière monsieur le maire qui officiait, je retrouvai la carte encadrée déjà remarquée lors d'une précédente occasion. Sur cette carte schématique d'un grand quart nord-est de la France, portant la reproduction de l'affiche de l'Ordre de Mobilisation Générale du 2 août 1914 et d'une photo du monument au morts, situé à quelques centaines de mètres de la mairie, avait été reportée une quinzaine de croix, chacune portant un nom et une date, indiquant le lieu où était tombé un enfant de la commune.

 

A quelques jours de la commémoration de l'armistice du 11 novembre 1918, je voulais partager avec vous l'émotion ressentie devant ce rappel à la fois simple et touchant du devoir de mémoire, en pensant à ce que leur devait, même plus d'un siècle plus tard, ceux qui se succédaient dans cette salle, membres du conseil municipal, futurs mariés et leurs proches ou simples visiteurs, tous pouvant, comme nous, évoquer notre belle devise : « A nous le souvenir, à eux l'immortalité ».

 

GBA (2S) Jean-Claude Ichac

Président d'honneur du comité d'Issy-les-Moulineaux du Souvenir Français

 

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