la coloniale

Publié le 31 Janvier 2024

Le Fezzan de l'adjudant Saubadine.

Philippe Saubadine a vécu avec sa famille à Ouargla en Algérie dans les années 1950. Sa mère était receveuse de La Poste et son père était adjudant au sein de la Compagnie saharienne portée des Oasis. En lisant les articles de ce site sur la Coloniale et les compagnies méharistes, M. Saubadine nous a donné l’autorisation de reproduire une partie de ses souvenirs et des aventures de son père (disparu en 2015), justement au temps de ces compagnies. Il a également rassemblé ses souvenirs dans un livre intitulé Il m’a été donné d’aller à Corinthe, publié aux Editions Vérone et publié de nombreux documents sur un site de Blogspot épisode 1 : exorde (rlpps.blogspot.com) 

Voici, avec son autorisation, des extraits de l’épisode relatif aux campagnes sahariennes.

 

Des sud-ouest de la métropole au désert du Sahara.

Jean Saubadine est engagé volontaire à l’âge de 19 ans, dans le corps franc Pommiès. Ce groupe de combattants est fondé en novembre 1942 par André Pommiès et opère partout dans le sud-ouest de la France. Relevant du BCRA (Bureau Central de Renseignements et d’actions – créé par le général de Gaulle en 1940), cette unité participe à la libération du territoire national, entre autres à la bataille d’Autun le 9 septembre 1944, puis à la libération des Vosges et de l’Alsace. A la fin de la guerre, le corps franc compte plus de 9.000 hommes dans ses rangs.

Ayant intégré le 49e régiment d’infanterie, Jean Saubadine est de tous les combats. Mais après la prise de Stuttgart et la victoire des Alliés en mai 1945, il est muté à Strasbourg dans des bureaux, ce qui ne lui convient pas vraiment. Aussi, lorsqu’il lui est proposé d’intégrer les Compagnies méharistes au Sahara algérien, il répond de suite par l’affirmative et débarque à Ouargla en 1948.

 

Les Compagnies méharistes.

Philippe Saubadine : « Ces compagnies sont remaniées en 1947. Les véhicules militaires tout terrain remplacent les dromadaires. Leur rayon d’action est immense : il couvre le grand erg oriental : plateau du Tinhert (In Amenas), région du Tidikelt (In Salah) -, l'Immidir (Arak), le Hoggar (Tamanrasset) et le Tassili des Ajjers (Djanet). Avec une distance est-ouest de 600 km et une distance nord-sud de 200 km, la superficie est de 120 000 km2.

En dépit de cette transformation, mon père et son peloton mènent, de 1946 à 1959, de longues traversées uniquement à dos de méhari. Les missions peuvent durer de trois à six mois, six pour les zones les plus éloignées ou difficiles d'accès. Il s'agit d'opérations de surveillance et de protection, de repérage, de poursuite et de démantèlement de partis rezzous, ainsi que de relevés topographiques et de migration de populations. Nous ne savons jamais où mon père se trouve, les facteurs de surprise et de désinformation étant primordiaux dans ce type de mission.

La reconnaissance se fait à un rythme aléatoire de kilomètres parcourus. Il faut tenir compte des tempêtes de sable dont la durée semble respecter la théorie du 3-6-9 (elle s'arrête au bout de trois jours, sinon de six, enfin de neuf) ; des points d'eau et de la potabilité à moins que le puits n'ait été volontairement empoisonné ; des renseignements fournis par les caravaniers.

Ces actions dérangent fortement les bandes armées dont la principale activité consiste à piller les fermes isolées, les campements nomades et les caravanes, prolongeant en cela les ancestrales razzias arabo-musulmanes envers les populations noires destinées à être soumises à l'esclavage. D'où une hostilité contre les français sciemment entretenue par la rébellion.

Un peloton de méharistes est composé de soixante-dix indigènes commandés par un officier ou un sous-officier français. Lors des bivouacs, mon père s'en remet à son ordonnance Kâadadah, un Châamba. Au début de la colonisation de l'Algérie, les Châamba représentaient la tribu la plus importante du Sahara répartie sur les territoires de Ghardaïa, El Goléa, Ouargla. Ils luttèrent farouchement contre l'armée de Bugeaud, à la fois par réflexe guerrier et parce que l'ingérence des Français menaçait leur prolifique commerce d'esclaves. C'est Laperrine qui parviendra à les intégrer dans les unités sahariennes. L'apport de leur connaissance parfaite du désert et de l'art du déplacement, ainsi que leur haine des Touareg, en feront des combattants de premier ordre. Il faudra néanmoins plusieurs années pour qu'ils se plient à la discipline et cessent de rentrer dans leur tribu chaque fois qu'ils estimaient avoir gagné suffisamment de solde. »

 

Le Fezzan.

Ph S : « Cette région, qui compose avec la Cyrénaïque et la Tripolitaine le territoire libyen, est soustraite à l'Empire italien par les Français en 1942. Depuis Brazzaville, De Gaulle enjoint Leclerc, alors commandant les troupes de l'Afrique française libre, de faire la jonction avec la 8e armée britannique qui avance en Cyrénaïque pour contrer l'offensive de Rommel contre le canal de Suez. Mais, toujours méfiant envers nos alliés, De Gaulle lui intime l'ordre de les écarter de toute velléité d'appropriation du Fezzan : "Le Fezzan doit être la part de la France dans la bataille d'Afrique. C'est le lien géographique entre le sud-tunisien et le Tchad."

La colonne Leclerc enlève Sebha, la capitale régionale, puis Mourzouk. L'accord signé au mois de janvier 1942 attribue l'administration du Fezzan à la France tandis que l'administration anglaise est établie sur la Tripolitaine et la Cyrénaïque.

L’adjudant passe son temps, entre novembre 1949 et octobre 1950 à ratisser la région entre Sebbah et Mourzouk. Il est tellement pris par les missions qu’il est obligé de reporter son mariage de plusieurs mois ! »

 

Région de Tidikelt.

Ph S : « Après avoir couvert quelques temps la région du Tassili n’Ajjer, l’adjudant Saubadine est chargé de se rendre dans celle de Tidikelt. Au cœur du Sahara, c'est la région la plus chaude du pays. Elle est dominée par le haut plateau du Tademaït où les nombreux oueds s'étendent à ses pieds, alimentés par une providentielle nappe phréatique.

A In-Salah, on entre dans la wilaya de Tamanrasset. La température y est caniculaire pendant pratiquement dix mois de l'année, les deux mois d'hiver pouvant passer sans aucune pluie. Et la distance parcourue à dos de dromadaire depuis Ouargla est d'environ mille quatre cents kilomètres.

La colonne méhariste rejoint la route impériale numéro 3 et franchit les gorges d'Arak pour se diriger vers In Amguel. Cette piste relie Alger au pays touareg par In-Salah et Tamanrasset. Puis c'est la traversée du Hoggar en contournant le massif du Tahat pour fondre sur l'oasis d'Abalessa. Fondre n'est pas le mot exact sachant qu'un méhari peut parcourir 40 km par jour en allure modérée et 60 en allure forcée. Les 80 km sont tranquillement couverts en deux journées avec un bivouac intermédiaire.

Sur cette période, de 1948 à 1959, les expéditions ne sont pas linéaires et les allées-venues depuis Ouargla empruntent des pistes variées en fonction des missions et des engagements ou poursuites sur le terrain. »

 

Tamanrasset.

Ph S : « Le peloton Saubadine se rend également à Tamanrasset.

Lieu chargé d'histoire, Tamanrasset a été la demeure religieuse et méditative du Père de Foucauld. Sa rencontre en Algérie (il servait dans le 4e Chasseur d'Afrique) avec Laperrine a profondément modifié sa façon de se comporter et a constitué le prologue à son engagement spirituel. Il sera reconnu comme le grand spécialiste de la culture et de la langue touarègues.

Il vit sur le territoire de ce peuple, lui l'ascète qui est proche de la notion de pénitence – tetubt – que lui reconnaissent les touareg. En 1905, le père de Foucauld construit sur le plateau de l'Assekrem la "Frégate", bâtiment en pierre qui abrite la sacristie et l'église à surfaces égales.

Quelque onze ans plus tard, il sent que l'environnement peut basculer dans l'hostilité, notamment à cause de raids senoussistes contre les non musulmans. Il fait bâtir son bordj civil et s'y installe en juin 1916. Il y sera assassiné six mois plus tard alors qu'il avait été fait prisonnier par ces bandes fanatiques qu'il redoutait.

Le peloton descendra ensuite sur In Guezzam, un fortin situé à la frontière avec le Niger.

Cependant, la Compagnie saharienne portée des Oasis intervient également dans la région de Biskra, au pied des Aurès, où sévissent les sections armées de l'ALN. Avec sa troupe, mon père débusque l'ennemi à Zeribet Ahmed, Darmoune et Zerinet El Oued, et met la main sur des caches d'armes. Cela lui vaut une citation à l'ordre de la division. »

 

Mission à Soukiès.

Ph S : « Au plus fort de la guerre d’Algérie, les combattants de l'Armée de Libération nationale (ALN) établissent des bases arrière en Tunisie d'où ils mènent des actions agressives de plus en plus fréquentes. Nos soldats ne peuvent pas les poursuivre au-delà de la frontière car, même s'il existe des accords de coopération militaire entre la France et la Tunisie, cette dernière exerce une solidarité maghrébine que son indépendance nouvellement acquise ne peut refuser aux frères algériens.

A l'instar de la ligne Pédron côté marocain, André Morice, alors ministre de la défense du gouvernement Bourgès-Maunoury, décide de construire un barrage électrifié afin de protéger les voies de circulation (route et voie ferrée) de Bône à Souk-Ahras ; barrage qui sera dénommé ligne Morice.

Printemps 1958, le peloton Royer prend ses quartiers à Négrine, le peloton Rozot à Ferkane et le peloton Saubadine à Soukiès. Soukiès est aux avant-postes et les fellaghas multiplient les infiltrations et les mouvements de fournitures d'armes. Les affrontements sont rudes et sanglants. La bataille des frontières étant la plus grande qui ait mis aux prises l'armée française et l'ALN. In fine, l'efficacité de la ligne sera maximum et l'ALN va alors subir de lourdes pertes en vies humaines, en prisonniers et en armement ».

 

 

 

Sources :

  • Site internet : https://rlpps.blogspot.com/2018/03/episode-4-les-campagnes-sahariennes-de.html et https://rlpps.blogspot.com/ 
  • Philippe Saubadine, Il m’a été donné d’aller à Corinthe, Editions Vérone.
  • Crédit photograhiques : Philippe Saubadine – archives familiales.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Archives du Souvenir Français d’Issy-les-Moulineaux.
  • Capitaine Pierre Montagnon : La guerre d'Algérie : genèse et engrenage d'une tragédie. (Edition française), 2004 ; 2005. Les Parachutistes de la Légion (1948-1962) ; 2006. Légionnaires d'hier et d'aujourd'hui.
Le Fezzan de l'adjudant Saubadine.
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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 15 Octobre 2023

Les coloniaux : Paul Voulet.

Paul Voulet nait à Paris – cinquième arrondissement – le 10 août 1866. La France du Second empire vient d’ordonner la rapatriement de ses soldats de la désastreuse aventure mexicaine.

Fils de médecin, Paul Voulet fait ses classes en Indochine, comme soldat au 4e régiment d’infanterie de marine. Régiment appelé l’un des « Quatre vieux » car les 4 premiers régiments d’infanterie de marine, qui remontent au régiment Royal – La Marine, étaient établis chacun dans un port (ils accompagnaient, sur des bateaux, les conquêtes coloniales) : le 1 à Cherbourg ; le 2 à Brest ; le 3 à Rochefort et le 4 à Toulon.

A l’issue de cette campagne en Asie, Voulet est nommé sergent puis passe sous-lieutenant à sa sortie de l’Ecole militaire d’infanterie. En 1893, affecté en Afrique occidentale, il participe activement à l’établissement du protectorat français en pays Mossi. Les Mossis sont un peuple établi au centre de l’actuel Burkina Faso, et au nord du Ghana, du Togo et du Bénin.

En 1898, le ministre des colonies, André Lebon, tient à féliciter Voulet pour ses victoires et lui confie, alors qu’il n’est que capitaine, la responsabilité de parvenir au lac Tchad pour assurer à la France le contrôle du cœur de l’Afrique. L’expédition est montée. Voulet se voit adjoindre le capitaine Julien Chanoine.

Mais l’expédition va s’avérer être un cauchemar : d’atroces massacres sont commis du fait des méthodes brutales de Voulet. Les soldats français ayant rencontré une résistance dans certains villages, placés sous l’autorité d’une reine locale, Sarraounia, se mettent à massacrer hommes, femmes et enfants. Les villages sont entièrement détruits.

La République, ayant pris connaissance de ses agissements, envoie le lieutenant-colonel Klobb reprendre la direction de la mission. Le capitaine Voulet refuse de céder aux ordres de Paris : « Vous vous êtes certainement rendu compte de l'infamie que vous avez commise à mon égard en venant ainsi, poussé par une ambition effrénée, me voler le fruit de mes efforts. »

Et l’impensable se produit : le capitaine Voulet, voyant arriver la colonne Klobb, fait tirer sur elle. Le lieutenant-colonel est tué sur le coup. Des soldats de Voulet se rebellent : ils sont passés par les armes. Voulet et Chanoine décident alors de rester en Afrique et de s’octroyer un royaume. Avec quelques hommes, les deux officiers s’enfuient. Ils ne vont pas très loin et sont tués à leur tour par leurs propres tirailleurs mutinés.

En 1923, un jeune administrateur colonial, Robert Delavignette, fait ouvrir les tombes des capitaines Voulet et Chanoine et les trouve vides !

Paul Voulet était titulaire des décorations suivantes : chevalier de la Légion d’honneur : médaille commémorative de l’expédition du Tonkin ; médaille coloniale.

 

Sources :

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 25 Février 2023

Les coloniaux : Alexis Labrousse.

Alexis Jacques Henri Labrousse nait le 25 mai 1860 à Teyssieu, un petit village situé dans les contreforts du Massif Central, dans le Lot. Un de ses oncles est mort colonel au Mexique, l’autre est capitaine en retraite. Peut-être ces parcours l’ont-ils fait rêver plus jeune ? Elève brillant, il rejoint le lycée jésuite Caousou de Toulouse et embrasse alors la carrière militaire : il est accepté à Saint-Cyr en 1881 où il devient officier d’infanterie de marine.

Promu capitaine en 1893, il est stationné à partir de 1898 au Tonkin (nord de l’actuel Vietnam) où il fait partie de l’état-major du commandant en chef des troupes de l’Indochine. Etant rapatriable au mois d'avril 1900, il demande l'autorisation en janvier 1900 « de rentrer en France par la Chine et la Russie. » Plutôt que le classique voyage par bateau via le canal de Suez, il choisit de faire du tourisme en passant par la Chine puis la Sibérie. Sur son chemin : Pékin. C’est alors que son histoire rejoint la grande.

 

La révolte des Boxeurs.

La Chine est alors en ébullition. Les « Poings de la justice et de la concorde », surnommés « boxeurs », sont en rébellion ouverte contre la modernisation, la présence des étrangers, et les chrétiens chinois en particulier. D’abord concentrés dans la province du Shandong et opposés au pouvoir de la dynastie mandchoue des Qing, ils vont finir par s’allier aux mandarins réactionnaires et se rapprocher de la capitale impériale.

Officiellement reconnus en janvier 1900, ils sont formellement organisés en milices en mai et directement dirigés par des princes de la cour. Les choses s’accélèrent alors à Pékin : face à une hostilité de plus en plus ouverte, le « quartier des légations », où sont regroupés les ambassades et les intérêts commerciaux étrangers, commence à organiser sa propre défense. Fin mai, quelques troupes étrangères sont débarquées à Tianjin et rejoignent hâtivement le quartier : ils sont à peine plus de 450, dont 78 marins français provenant des navires d’Entrecasteaux et Descartes commandés par le lieutenant de vaisseau Eugène Darcy. De passage, le capitaine Labrousse n’est pas l’un d’eux, mais il se met immédiatement à sa disposition le 14 juin (comme d'autres volontaires civils, dont, le compagnon de voyage de Labrousse, le vicomte de Chollet).

Puis, le 20 juin, le chef de la légation allemande, le baron von Ketteler, est assassiné en pleine rue par un soldat régulier chinois. L'armée impériale et les boxeurs encerclent les légations, prêts à en finir une fois pour toute avec ces étrangers. Le siège commence. Il va durer 55 jours.

 

Le rôle du capitaine Labrousse durant le siège.

Les assiégés comptent également 473 civils et environ 3000 Chinois chrétiens venus se réfugier dans le quartier des légations. Autant de bouches à nourrir, de mains à occuper et d’esprits à calmer. Car, il y a de quoi paniquer : face à une marée d’insurgés qui ne songe qu’à tuer et piller, les soldats étrangers, eux, ne sont équipés que d’armes légères et disposent de peu de munitions. La seule pièce d’artillerie est un vieux canon à chargement par la bouche qui est découvert, déterré et remis en état. On le surnomme « canon international » : le fût est britannique, l’affût italien, les obus russes et les artilleurs américains. La défense s’organise ainsi.

Dans cette désolation, le capitaine Labrousse se montre exemplaire : toujours plein d’entrain et volontaire. Le 24 juin, un officier américain l’interpelle : il a vu des assaillants se préparer à franchir une barricade du côté de la légation allemande. Sans hésiter, ils repoussent ensemble l’attaque, l’un avec son pistolet, l’autre avec sa carabine. Quelques jours plus tard, quand le commandant Darcy l’envoie en renfort sur le front de la légation américaine, il lui répond : « Et dire que j'avais prévu de passer quelques jours de vacances à Pékin. Je n’aurais jamais osé espérer mieux, mon cher ami ! » Les marines américains viennent de perdre leur chef et sont quasiment résolus à se laisser submerger par la prochaine vague boxeurs. Grâce au capitaine Labrousse, l’esprit de défense et la situation des Américains sont rétablis.

Dans son ouvrage monumental, L'été rouge de Pékin, Jean Mabire le peint ainsi, non sans malice : « Un homme d’aspect rude, avec un visage carré que barre une grosse moustache claire. En véritable officier de "Marsouins", il a beaucoup couru le monde et considère la situation à Pékin comme catastrophique, donc intéressante. »

 

La mort du capitaine Labrousse.

Actif sur tous les fronts, le capitaine Labrousse n’est pourtant légèrement blessé qu’une seule fois, le 28 juin, au genou. Mais la chance l’abandonne le 12 août, alors que les assauts des boxeurs atteignent leur paroxysme : le corps expéditionnaire envoyé en Chine pour délivrer les légations est aux portes de Pékin et les insurgés veulent en finir avec ces diables d’étrangers qui leur tiennent tête depuis plus de 50 jours.

Le commandant Darcy décrit ainsi les derniers instants du capitaine Labrousse en ce début de soirée du 12 août 1900 : « A huit heures, nous allons M. Labrousse et moi, sur le seuil de la porte de la salle à manger et nous regardons le parc que les herbes ont envahi depuis que personne ne le foule. Labrousse me fait remarquer que, de l’endroit où nous sommes, un factionnaire verrait très bien l’ennemi s’avancer, et pourrait prévenir tout de suite si cet ennemi tentait un assaut. Sa phrase n’est pas achevée qu’une balle le frappe au front, entre les deux yeux. Il tombe en arrière, sans pousser un seul cri ; la mort a été foudroyante. »

Le lendemain matin à 9h, au grand désespoir des assiégés, on l’enterre, dans le cimetière improvisé sur le terrain de la légation d’Angleterre, le « glorieux petit cimetière de la légation » de Pierre Loti. Le médecin militaire Jean-Jacques Matignon écrira : « Par son courage, son calme et son énergie, Labrousse avait forcé l’admiration de tous les étrangers. Très dur envers lui-même, il exigeait beaucoup des autres. Brave sans forfanterie, audacieux jusqu’à la témérité, il était le type accompli de l’entraîneur d’hommes. ».

Revêtu de son habit, lié sur une simple planche, il est inhumé à même le sol puis recouvert d’une épaisse couche de chaux vive – pour que son corps ne soit pas profané, si jamais les boxeurs arrivaient jusque-là.

Le surlendemain, 15 août 1900, le quartier des légations est enfin libéré par des troupes allemandes, américaines, anglaises, italiennes, russes, autrichiennes et même japonaises. Le contingent français étant dirigée par le général Frey. Les pertes du côté des légations sont d’environ 30.000 Chinois chrétiens, 2.500 militaires et 526 civils étrangers ; du côté des militaires chinois, elles sont d’environ 20.000 militaires. Les pertes des Boxers sont inconnues, mais un fait est avéré : le mouvement est anéanti.

Aujourd’hui, une tombe trône au bord d’une petite route de la campagne quercinoise. Il s’agit de celle du capitaine Labrousse, dont le corps aurait donc été rapatrié. Sur cette pierre tombale figure l’inscription : « Ici repose Alexis Jacques Henri Labrousse, capitaine d’infanterie de marine, tué à l’ennemi à Pékin le 12 août 1900, à l’âge de 40 ans. »

Le nom du capitaine Labrousse figure sur les plaques commémoratives de l’Ecole du Caousou, sur le Livre d’or de l’annuaire de la Saint-Cyrienne et aux archives des Légations.

 

Sources :

  • Cet article a d’abord été publié sur le site Internet du Souvenir Français de Chine et rédigé par David Maurizot.
  • Pierre Loti, Les derniers jours de Pékin, Calmann Lévy, 1901.
  • Alber-François-Ildefonse d'Anthouard, La Chine contre l'étranger : Les Boxeurs, Plon, 1902.
  • Eugène Darcy, La défense de la Légation de France à Pékin, Augustin Challamel, 1903.
  • Jean-Jacques Matignon, Dix ans aux pays du dragon, A. Maloine, 1910.
  • Jean Mabire, L’été rouge de Pékin, la révolte des Boxeurs, Fayard, 1978.
  • Larry Clinton Thompson, William Scott Ament and the Boxer Rebellion, McFarland, 2009.
  • Page Facebook de Nicolas Savy, historien, et photographe de la tombe du capitaine Labrousse.
  • Site Mémorial Gen Web – Fiche du capitaine Labrousse.
Les coloniaux : Alexis Labrousse.

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 4 Septembre 2022

Les coloniaux : Paul Joalland.

Fils d’un capitaine d’artillerie de marine, Paul Joalland nait le 8 novembre 1870 en Guadeloupe. Il fait des études au lycée Dupuy-de-Lôme de Lorient. En 1889, il suit les traces de son père et devient à son tour officier dans l’artillerie. Affecté au 1er régiment d’artillerie coloniale (RAC), il est envoyé en Indochine où il combat les Pavillons noirs.

En 1894, après un passage à l’école d’infanterie de Versailles, il est muté au Soudan. Là-bas, il est promu lieutenant. Retour en France l’année suivante pour un poste à l’école de pyrotechnie à Toulon. Il y rencontre le capitaine Voulet, connu chez les officiers de la Coloniale pour avoir mené avec succès une expédition dans le pays mossi (Burkina Faso). Joalland lui demande d’être de la prochaine mission en Afrique.

C’est ainsi que Paul Joalland participe à la Mission Voulet-Chanoine commandée par les capitaines Voulet et Chanoine. Très vite, la colonne est confrontée à des attaques incessantes et se distingue par des représailles violentes. Lorsqu'ils sont connus, ces actes barbares sont condamnés par le gouvernement qui décide de placer Voulet et Chanoine en état d'arrestation. Le colonel Klobb est désigné pour retrouver et arrêter les deux capitaines. Il prend comme adjoint le lieutenant Meynier. Le colonel Klobb rejoint Voulet à Dankori le . Voulet n'obéit pas aux ordres de Klobb, le menace et finalement le tue. Meynier est légèrement blessé. Paul Joalland et les autres officiers de la colonne décident de la quitter. Ils rejoignent, avec le lieutenant Meynier, Nafouta au Soudan.

Quelques jours plus tard, Chanoine et Voulet sont abattus par les tirailleurs soudanais qui refusent de les suivre et rejoignent les autres officiers. Le lieutenant Pallier, qui est le plus âgé, secondé du lieutenant Joalland, prend alors le commandement de la colonne. Ils prennent Zinder (Niger). Le lieutenant Pallier décide de rejoindre le Soudan et confie à Joalland le commandement de la colonne, secondé par le lieutenant Meynier. La colonne prend ainsi le nom de mission Joalland-Meynier. Paul Joalland est promu au grade de capitaine à compter du .

Le capitaine Joalland pacifie le pays. Il organise Zinder et confie au sergent Bouthel le commandement de la place. La mission continue et fort d'une escorte de 165 hommes, le capitaine Joalland se lance le vers le Kanem. La colonne atteint le lac Tchad le . L'expédition repart le . Après la bataille de N’Gouri, les troupes s'emparent de la capitale du Kanem et placent ce pays sous le protectorat de la France. Le , la jonction est faite avec la mission Gentil et la mission Foureau-Lamy (se reporter, sur ce site, aux portraits du commandant Lamy et d’Emile Gentil dans la catégorie La Coloniale). Le commandant Lamy prend le commandement de l'ensemble des missions et s'installe à Kousséri. Le , l'attaque du camp fortifié de Rabah est décidée et les troupes françaises sont victorieuses et Rabah est tué. Le commandant Lamy décède de ses blessures. Le capitaine Joalland retourne à Zinder, où son prestige auprès du sultan de Zinder est immense. Il quitte Zinder le .

Le , le capitaine Joalland arrive à Marseille. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur. Il reçoit également la médaille coloniale avec agrafe en or. Il se marie en . Il poursuit sa carrière d'officier colonial en Cochinchine (1902-1903) puis au Tonkin (1905-1907). Il est promu commandant en 1907.

En 1914, il part au front à la tête d'un groupe de batteries du 29e régiment d’artillerie. Il est promu lieutenant-colonel en 1915 et participe aux opérations en Alsace et sur le front de Soissons à Saint-Quentin. Il se distingue particulièrement à l'attaque de Seppois qui précède la première offensive de Verdun et termine la guerre avec le grade de colonel.

À la fin du conflit, il retrouve les colonies et commande l'artillerie à Madagascar. Il prend en 1922 le commandement du 1er régiment d'artillerie coloniale (RAC) à Lorient basée au quartier Frébault. En 1925, il repart en Afrique-Occidentale française.

Il prend sa retraite à Lorient. Le , il est promu général de brigade au titre de réserve. Il décède le à Lorient lors des premiers bombardements de la ville par la Royale Air Force. Il avait écrit Le Drame de Dankon : mission Voulet-Chanoine – Mission Joalland-Meynier, paru aux Editions Argo en 1930.

 

Sources :

  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Ministère des Armées.

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 6 Juin 2022

Les coloniaux : Hubert Lyautey.

Hubert Lyautey nait à le 17 novembre 1854.

Issu d’une vieille famille franc-comtoise, Hubert Lyautey, comment nombre de ses ancêtres (notamment sous le Premier empire) se destine très tôt à la carrière militaire et entre à Saint-Cyr en 1873. Après avoir poursuivi sa formation à l’école de guerre, il est envoyé en Algérie où il demeure deux ans comme officier de cavalerie. Rentré en Europe, Lyautey, fervent monarchiste, rend visite dans son exil au comte de Chambord, pour lui témoigner son dévouement. Mais, devant la division et la faiblesse des royalistes, ce légitimiste de cœur doit cependant se rallier, par raison, à la République.

En 1894, Hubert Lyautey, qui est appelé à accomplir l’essentiel de sa carrière hors de la métropole, quitte de nouveau la France pour le Tonkin d’abord, puis pour Madagascar, en 1897, où il part avec Gallieni. Devenu colonel, en 1900, Lyautey parvient à pacifier la région et à en favoriser le développement économique.

En 1903, il est appelé par le gouverneur général Jonnart, en Algérie. Œuvrant avec efficacité pour le maintien de la paix, il y reçut ses étoiles de général. En 1912 enfin, celui qu’on allait surnommer Lyautey l’Africain devient le premier résident général de France au Maroc. Il donne là toute la mesure de son génie de stratège et de grand administrateur. Ayant pris rapidement une connaissance parfaite de la région, du terrain et des mœurs comme des tribus, il est soucieux de respecter la religion islamique dont il s’instruit, et de respecter aussi la personne du sultan, Commandeur des croyants. Il sait s’attirer la confiance des élites locales, prenant dans son sens exact le terme de protectorat. Il sait pacifier et il sait bâtir, créant notamment avec Casablanca les premières structures du Maroc moderne.

Pendant la première guerre mondiale, il quitte temporairement ses fonctions pour devenir, entre décembre 1916 et mars 1917, ministre de la Guerre dans le cabinet Briand. Après avoir regagné le Maroc, il est fait, en 1921, maréchal de France. Mais l’hostilité du cartel des gauches lui ôte, durant le gouvernement Painlevé, le commandement des troupes engagées contre la rébellion d’Abd-el-Krim pour les confier à Pétain, ce qui le conduit à donner sa démission et à rentrer définitivement en France, en 1925. Il y remplit, avant de mourir, une dernière mission : l’organisation de l’Exposition coloniale de 1931.

Caractère exceptionnel, doué d’une remarquable intelligence dans l’action, Hubert Lyautey a consacré quelques ouvrages au métier militaire. L’essai qu’il publie en 1891 dans La Revue des deux mondes, Du rôle social de l’officier dans le service militaire universel, dans lequel il fait connaître sa conception humaniste de l’armée, a un grand retentissement et influence toute une génération d’officiers. Il développe ces thèmes dans un ouvrage, Le rôle social de l’armée (1900), et publie également Dans le sud de Madagascar, pénétration militaire, situation politique et économique (1903), le fruit de son expérience coloniale.

Hubert Lyautey n’est pas encore maréchal de France quand il est élu à l’Académie française, le 31 octobre 1912, au fauteuil d’Henry Houssaye par 27 voix. Il n'est reçu qu’après la guerre, le 8 juillet 1920, par Mgr Duchesne.

Mort en France, le 27 juillet 1934, Lyautey est, selon ses dernières volontés, enseveli à Rabat. En 1961, après l’indépendance du pays, sa dépouille est ramenée en France pour être déposée aux Invalides.

 

Sources :

  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Site de l’Académie française.
  • Lyautey par André Le Révérend, Fayard, 1989.

 

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Publié le 13 Décembre 2021

Les coloniaux : Louis Delaporte.

Louis Delaporte nait le 11 Janvier 1842 à Loches (Indre-et-Loire). Très jeune, il décide d'être marin et est reçu à l’École navale de Brest en 1858. Nommé aspirant, il embarque en 1861 pour le Mexique au moment de l’intervention française demandée par Napoléon III.

Enseigne de vaisseau quelques années plus tard, Louis Delaporte est plus remarqué par ses talents de dessinateur que par son sens de la guerre. De fait, le capitaine de frégate Ernest Doudart de Lagrée l’emmène avec lui en Cochinchine (1866) pour la Mission d’exploration du Mékong, mission d'exploration et de recherche des sources du fleuve.

Delaporte découvre à cette occasion le site d'Angkor. Mais, la mission tourne au désastre à cause des conditions climatiques et sanitaires. La remontée du fleuve est abandonnée et le retour se fait par le Yang-Tseu-Kiang. Doudart de Lagrée y laisse la vie et les survivants regagnent Saïgon par la mer sous le commandement de Francis Garnier.

La découverte d'Angkor est pour Delaporte la révélation de tant de beauté et de splendeur qu’il décide de faire connaître l’art khmer à toute l’Europe. Il indique : « Je n’admirais pas moins la conception hardie et grandiose de ces monuments que l’harmonie parfaite de toutes leurs parties. […L’art khmer…] s’écarte, il est vrai, de ces grandes œuvres classiques du bassin de la Méditerranée qui pendant longtemps ont seules captivé notre admiration : ce ne sont plus ces colonnades majestueuses ; ce sont au contraire des formes laborieuses, complexes, tourmentées : superpositions, retraits multiples, labyrinthes, galeries basses à jour, tours dentelées, pyramides à étages et à flèches innombrables ; une profusion extrême d’ornements et de sculptures qui enrichissent les ensembles sans en altérer la dignité ; c’est, en un mot, une autre forme de beau. » A cette occasion, Louis Delaporte dégage le temple du Bayon et relève les plans d'Angkor Vat.

De retour en France en 1868, il est promu au grade de lieutenant de vaisseau et ai fait chevalier de la Légion d’honneur. Quand la guerre de 1870 éclate, il est appelé à la surveillance des côtes françaises dans le Nord. Cependant, il n'oublie pas pour autant les splendeurs aperçues quelques années auparavant à Angkor. Il ne repart qu'en 1873–74, avec l'appui de la Société de géographie en mission officielle d’étude.

Louis Delaporte obtient des ministères de la Marine, des Affaires étrangères et de l'Instruction publique, une double mission : celle de vérifier la navigabilité du fleuve Rouge de son delta jusqu'au Yunnan et celle de constituer la première collection officielle d'art khmer en France.

Louis Delaporte, dans des conditions très difficiles, effectue une « moisson archéologique » constituée de statues, fragments d'architecture et moulages, auxquels s'ajoutent documents topographiques et dessins. Louis Delaporte prélève quelques pièces qu'il souhaite arracher à la nature qu'il perçoit comme profondément destructrice, qui sont par la suite ramenées en France grâce à la canonnière Javeline. Le roi Norodom 1er du Cambodge accepte cette prise de patrimoine en témoignage de la grandeur et de l’ancienneté de la civilisation khmère.

Mais le musée du Louvre refuse d'accueillir la centaine de caisses d'antiquités débarquées à Toulon. C'est finalement au château de Compiègne que Delaporte réussit à faire ouvrir une salle d'exposition pour cet art encore peu reconnu. Ce n'est qu'en 1878 que, grâce à l'Exposition universelle de 1878 exposant ces œuvres au Palais du Trocadéro, que l'intérêt du public et des scientifiques s'éveille. Il faut cependant attendre 1882 pour qu'une aile du Trocadéro soit consacrée officiellement à un musée de l'Art Khmer.

Delaporte effectue en 1881 un dernier voyage sur place mais il tombe gravement malade et désormais devra rester en France. Cette expédition permet d'enrichir encore le fonds du musée.

En 1889, le musée Khmer devient musée Indochinois et s'ouvre largement sur l'ensemble des arts de l'Asie du Sud-Est. En 1894, il recrute comme assistant Charles Carpeaux le fils du célèbre sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux qui deviendra par la suite archéologue et photographe en Indochine au Sanctuaire de My Son au côté d'Henri Parmentier et à Angkor au côté d'Henri Dufour. C'est grâce à Louis Delaporte qu'entre 1894 et 1901, pendant sept ans, Charles Carpeaux y acquiert une connaissance très pointue sur l'ensemble des statues sculptées sur les temples en étant capable d'en deviner les divinités qu'elles représentaient.

C'est aussi un peu grâce à lui et à l'intérêt qu'il a su éveiller pour les arts du Cambodge qu'en 1898 est fondée à Hanoï l’École française d’Extrême-Orient (EFEO).

La Conservation d’Angkor est créée dès 1908 afin de mettre les plus belles pièces à l’abri des convoitises tout en les restaurant, tandis que l’arsenal législatif se durcit. « Pas une pierre ne quittera désormais sa place sans une autorisation régulière. La période nomade est close et espérons-le, définitivement », peut-on lire dans un compte-rendu de séance datant de 1901.

Devenu conservateur, Louis Delaporte dirige son musée du Trocadéro avec peu de moyens mais avec une passion intacte. Il y passe tout son temps avec sa grande blouse blanche, soit dans son vaste et froid sous-sol converti en atelier de moulage, soit dans son petit cabinet de travail encombré de plans et de dessins, ou encore sur le haut de l'échelle, rectifiant à la gouge les détails d'ornementations.

Louis Delaporte meurt l'année suivante, le 3 mai 1925 à l'âge de 83 ans. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.

 

Sources :

  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Ministère des Armées.
  • Vincent Charpentier. Avec Pierre Baptiste, conservateur en chef et Thierry Zéphir, ingénieur au musée Guimet, « Angkor de la découverte à la création d'un mythe », sur INRAP : Le Salon noir, .
  • Louis Delaporte. Explorateur (1842 - 1925) par René de Beauvais - Paris 1929.

 

Louis Delaporte et ses collègues de la mission Mékong.

Louis Delaporte et ses collègues de la mission Mékong.

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Publié le 28 Août 2021

Joseph Joffre en 1889.

Joseph Joffre en 1889.

1885. Joseph Joffre a trente-trois ans.

Issu de l’école Polytechnique, il est de l’arme du génie. En 1872, il est entré à l’Ecole d’application de l’artillerie et du génie de Fontainebleau et a épousé Marie-Amélie Pourcheiroux, qui meurt en couches, deux années plus tard. Après une décennie à travailler aux fortifications de Paris, du Jura puis des Pyrénées-Orientales, dont il est originaire, il a demandé sa mutation en Extrême-Orient. Demande acceptée au début de l’année 1885.

Il est donc envoyé sur l’île de Formose (Taiwan). Nommé chef du génie sous les ordres de l’amiral Courbet, il prend en charge la fortification de la base de Chilung. L’objectif qui lui a été fixé est simple : dans la cadre de la guerre franco-chinoise, Joffre doit assurer la mainmise de la République française sur le Tonkin. Si l’Annam a accordé un protectorat français sur cette région du nord de l’actuel Vietnam, la conquête puis la pacification ne sont pas des campagnes faciles.

A la tête du génie, le capitaine Joffre est chargé d’organiser des postes de défense, d’améliorer les hôpitaux, d’ouvrir de nouvelles routes, des digues et des bureaux pour que l’armée puisse prendre possession de ses nouveaux territoires. Alors que la Chine abandonne toute prétention sur le Tonkin, Joffre gère le conflit contre ce qu’il reste des Pavillons Noirs, et qui sont devenus plutôt des bandits de grand chemin que des soldats assurant la lutte contre le colonisateur français.

En 1888, Joffre quitte le Tonkin, après avoir reçu la Légion d’honneur et avoir été cité à l’ordre de la division. Son retour en métropole va prendre plusieurs mois car il passe par la Chine, le Japon puis les Etats-Unis.

En septembre 1888, promu au grade de commandant, il est nommé au cabinet du directeur du génie. Il se spécialise dans la logistique ferroviaire. Ce poste ne dure guère : au début de l’année 1891, il est affecté au 5e régiment du génie puis à l’Ecole d’application de l’artillerie et du génie.

En octobre 1892, Joffre est envoyé en Afrique, dans la région du Soudan français (Mali). Il y dirige la construction d’une ligne de chemin de fer entre la capitale de cette région et Bamako. Au début de l’année 1894, Grodet, gouverneur du Soudan français confie au commandant Joffre une colonne pour continuer la conquête au nord de Bamako. Ainsi, Tombouctou tombe-t-elle aux mains des Français. Pour son fait d’armes, Joffre est nommé lieutenant-colonel.

Entre deux missions, de passage à Paris, il revoit une ancienne connaissance, Henriette Penon, à qui il fait un enfant, Germaine, qui viendra au monde le 1er janvier 1898 (Joffre épousera Henriette, civilement, en 1905).

Colonel en 1900, Joffre participe à la colonisation de Madagascar sous les ordres du général Gallieni. Au cours de son séjour malgache, et après vaincu des résistances locales, après avoir assuré la fortification du port de Diego-Suarez, Joffre est fait général de brigade et reçoit les insignes de commandeur de la Légion d’honneur.

Le général Joffre retourne en France au printemps de l’année 1903. On connait la suite : directeur du génie au ministère de la Guerre, chef de l’Etat-major de l’armée française, il va éviter à sa tête une défaite en 1914, et sous son commandement va remporter les victoires de la Marne puis de Verdun. Victoires ternies par les terribles batailles, pour peu de gains de terrains, de Champagne en 1915 et de la Somme en 1916.

Fait maréchal de France à la fin de l’année 1916, académicien, Joseph Joffre meurt en 1931.

 

Sources :

  • Joffre, Arthur Conte, Ed. Olivier Orban.
  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Ministère des Armées.

 

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Publié le 24 Juillet 2021

Les coloniaux : le maréchal Gallieni.

Joseph Gallieni nait en 1849 en Haute-Garonne. Il est d’origine italienne. Son père est officier d’infanterie.

En 1868, Joseph intègre l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr et en sort deux années plus tard avec le grade de sous-lieutenant. A la tête d’une section du 3e régiment d’infanterie de marine il participe à la Guerre franco-prussienne, notamment à Bazeilles. Blessé et fait prisonnier, il ne va rentrer en France que le 11 mars 1871.

En 1873, promu lieutenant, il passe trois années à la Réunion au sein du 2e régiment d’infanterie de marine. En 1876, ayant été muté au sein des tirailleurs sénégalais, il embarque pour Dakar, et de là, mène plusieurs expéditions en Afrique noire, entre autres l’exploration du fleuve Niger et l’établissement de postes aux frontières de l’Empire toucouleur. Ses succès lui permettent de passer capitaine en 1878.

Entre 1883 et 1886, nommé lieutenant-colonel, il est en Martinique puis est de nouveau affecté en Afrique. L’armée lui confie le commandement supérieur du Haut-Fleuve, c’est-à-dire la colonie du Sénégal. Il obtient des succès face aux chefs locaux comme Ahmadou ou Samary Touré. Son successeur, Louis Archinard arrive en 1888.

Joseph Gallieni est de retour en France où il est breveté d’état-major puis reçoit les galons de colonel. De 1892 à 1896, il est envoyé au Tonkin où il commande le 3e régiment de tirailleurs tonkinois.

Il lutte contre les pirates chinois puis consolide la présence française en organisant l’administration du pays. Son principal collaborateur est alors le commandant Lyautey. C’est à cette époque qu’il élabore les prémices de ce qui est convenu d’appeler sa doctrine coloniale, tels que la « tache d’huile », et la « politique des races », raffinement de la politique du diviser pour régner. Il s’exprime en outre avec une brutale franchise sur la méthode à suivre pour affermir les conquêtes coloniales : « Frapper à la tête et rassurer la masse égarée par des conseils perfides et des affirmations calomnieuses, tout le secret d’une pacification est dans ces deux termes. En somme, toute action politique dans la colonie doit consister à discerner et mettre à profit les éléments locaux utilisables, à neutraliser et détruire les éléments locaux non utilisables. »

Promu général de brigade en 1896, il est envoyé à Madagascar en tant que résident général. La cour royale, foyer de résistance contre la France, est placée sous surveillance. Il convient d’ajouter qu’à la méthode diplomatique, Gallieni opte plutôt pour la méthode rugueuse. Cela abouti à la déchéance de la reine Ranavalona III, exilée sur l’île de la Réunion. Cependant, dans le même temps, le général fait couvrir Madagascar d’infrastructures : chemin de fer, ponts, établissements publics, écoles laïques dans lesquelles sont dispensés des cours en français.

A Madagascar, comme auparavant en Indochine, Gallieni fait appliquer la politique dite de politique des races, qui consiste dans la reconnaissance de l’identité de chaque groupe ethnique et la fin de leur subordination à un autre groupe ethnique.

En août 1899, Joseph Gallieni est promu général de division. Depuis son séjour au Soudan, il a gagné de nombreuses relations au sein de ce que l'on nomme le « Parti colonial », un groupe de pression qui regroupe parlementaires, journalistes et représentants de chambres de commerce. Il publie plusieurs ouvrages narrant son expérience coloniale et y gagne une réputation d'administrateur capable. Il est alors considéré comme l'un des grands chefs militaires du moment.

À son retour définitif en France, en 1905, il a encore dix années devant lui avant la retraite. Il les consacre à préparer « la Revanche ». Gouverneur militaire de Lyon et commandant du 14e corps d’armée dès son retour, Grand-croix de la Légion d’honneur en novembre 1905, il est appelé au Conseil supérieur de la guerre en août 1908. Pressenti pour devenir commandant en chef de l’Armée française en 1911, il refuse l’offre pour la laisser au général Joffre, qui avait été l'un de ses adjoints à Madagascar, en prétextant son âge et sa santé.

Il prend sa retraite en avril 1914, mais il est rappelé en août après le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Le 26 août 1914, il est nommé gouverneur militaire de Paris. Alors que les Allemands approchent et que le gouvernement part pour Bordeaux en catastrophe, Gallieni met la ville en état de défense, rassure les Parisiens par une proclamation et contribue à la victoire de la Marne, en septembre 1914, grâce, notamment, aux troupes, commandées par le général Edgard de Trentinian, qu’il envoie en renfort, après avoir réquisitionné les taxis parisiens.

Le 29 octobre 1915, il est nommé ministre de la Guerre du 5e gouvernement d’Aristide Briand. Il entre en conflit avec Joffre et évoque publiquement les erreurs commises à Verdun. Briand le désavoue et il est contraint de démissionner le 10 mars 1916.

Ayant des problèmes de santé, notamment un cancer de la prostate, il meurt le 27 mai 1916. Après des funérailles nationales et conformément à ses dernières volontés, il est inhumé auprès de son épouse dans le cimetière de Saint-Raphaël.

Il est élevé à la dignité de maréchal de France à titre posthume en mai 1921. La promotion de Saint-Cyr de 1927 et l’avenue traversant l’esplanade des Invalides portent son nom.

 

Sources :

  • Gallieni, par Marc Michel, Ed. Fayard.
  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Ministère des Armées.

 

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Publié le 23 Janvier 2021

Les coloniaux : le colonel d’Aubignosc.

Les Zouaves.

Louis-Philibert d'Aubignosc (1774-1848) entre dans l’armée comme officier de cavalerie. Après quelques affectations, il passe dans l’artillerie de marine. Nommé administrateur général de l'armée d’Italie, il participe à la campagne d’Egypte. Arabisant, élève de Silvestre de Sacy, il fait partie des orientalistes (dits « interprètes de l'armée ») emmenés par Bonaparate ; il y est fait prisonnier par les Turcs. Par la suite, il forme des élèves interprètes, appelés « guides interprètes de l’armée », corps désormais militaire institué en 1803.

En 1808, il est nommé commissaire-administrateur des domaines, des forêts et de la contribution foncière en Russie. Par décret du 29 janvier 1811, il est nommé commissaire général de police, puis directeur général de la police impériale à Hambourg, chargé de lutter contre la contrebande et de surveiller l'opinion, sous la direction de Jean-François Alexandre Boudet de Puymaigre.

En 1830, il participe à l'expédition d’Alger comme membre de l'état-major du général de Bourmont et, le 6 juillet 1830, lendemain de la reddition d’Alger, il est nommé, en tant que lieutenant général de police membre de la « commission de gouvernement » instituée alors par le commandant en chef.

Comme lieutenant général de la police, d’Aubignosc a sous ses ordres, un inspecteur, deux commissaires de police et une brigade de sûreté maure, composée de vingt agents commandés par un mezouar. À la fin du mandat de Bourmont, relevé de ses fonctions vers le 15 août (à la suite de la Révolution de Juillet), il élabore avec le concours du capitaine Yusuf (Joseph Vantini), un projet d'unité indigène de zouaves, en utilisant des soldats précédemment au service de la régence d’Alger, les janissaires.

Le général Clauzel, successeur de Bourmont, reprend ce projet. Un arrêté du 1er octobre 1830 crée un bataillon de zouaves indigènes ; la décision est entérinée par une ordonnance royale du 21 mars 1831.

 

Les unités d’infanterie légère de zouaves, qui appartiennent toutes à l’Armée d’Afrique, sont alors composées d’indigènes – comme il était coutume de dire à l’époque – et aussi de nombreux métropolitains, venus chercher de l’aventure. Les unités de zouaves sont parmi les plus citées et décorées de l’Armée française.

 

Faire le zouave.

Au ministère des Armées, l’expression « faire le zouave » est prise très au sérieux. Et deux hypothèses s’avancent… La première affirme que ce corps d’armée réputé imposait une telle rigueur et une telle discipline que les soldats qui le composaient en devenaient idiots. Une idée fausse quand on sait que les régiments de zouaves se sont illustrés sur de nombreux champs de bataille, notamment pendant la Première et la Seconde Guerre mondiale, puis en Algérie et en Indochine. Des idiots en auraient été bien incapables...

La deuxième hypothèse se baserait sur l’uniforme particulier porté par les zouaves. Il était composé d’un pantalon bouffant, de guêtres blanches, d’une longue ceinture (de 3 m !), d’une veste courte, d’une chéchia ornée d’un gland coloré et d’un turban… Cet uniforme assez particulier, qui démarquait les zouaves des autres corps de l’armée française, remportait un grand succès auprès du public lors des défilés militaires. Mais avec le temps, il est possible que cette tenue originale ait été considérée comme drôle et par déformation, la tenue drôle ait fait pensé à un clown. Tout le contraire des zouaves donc, réputés pour leur courage, leur discipline et leur ardeur au combat.

 

Sources :

 

 

Le colonel d’Aubignosc.

Le colonel d’Aubignosc.

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Publié le 6 Septembre 2020

Les coloniaux : le commandant Marchand.

La mission Congo-Nil.

La politique française d’expansion impérialiste en Afrique noire, engagée dès le second Empire, s’amplifie sous la IIIe République : Congo (1880), Djibouti et côte somalienne (1888), Guinée et Soudan (1891), Côte d’Ivoire et Dahomey (1893) sont conquis.

Ayant le projet de relier ses possessions de Dakar à Djibouti, la France décide, en 1896, d’envoyer une mission d’exploration militaire en Afrique, dont le commandement est confié à Jean-Baptiste Marchand, officier des tirailleurs sénégalais depuis 1887.

La « mission Congo-Nil » parvient jusqu’à Fachoda, mais les Britanniques, qui souhaitent aussi contrôler ces territoires situés au sud de l’Égypte, exigent le départ des Français. C’est la « crise de Fachoda » (juillet à novembre 1898), durant laquelle les troupes du général Kitchener sont prêtes à attaquer celles que commande Marchand. Dans une atmosphère de grande tension, alimentée par le nationalisme des populations qui suivent l’affaire avec passion, une solution diplomatique est finalement trouvée : le gouvernement français ordonne à Marchand de se retirer.

Pour avoir mené cette expédition, résisté aux Britanniques et n’être parti que par obéissance, le commandant reprend du service en 1914 en tant que colonel de réserve et est promu général de brigade en février. Il est par la sutie blessé au cours de la seconde bataille de Champagne le 25 septembre 1915, mais il survit et participe à la guerre jusqu’à l’armistice.

Avec le grade de général de division, Jean-Baptiste Marchand quitte l’armée définitivement le 4 avril 1919.

 

Une carrière politique.

Sa carrière civile a nettement moins d’éclat que sa carrière colonaile. Il entre en journalisme et s’essaye à la politique, mais sans grand succès : en 1906, il se présente à Paris aux élections législatives sous l’étiquette Républicain démocrate. En tête au 1er tour, il est battu au 2e avec 49 % des voix par le socialiste Arthur Groussier. En 1910, il épouse Raymonde de Serre de Saint-Roman, qui possède des biens à Saint-Roman-de-Codières et à Sumène dans le Gard. Marchand y vient désormais souvent et y est élu en 1913 conseiller général du canton de Sumène. Il le reste jusqu’en 1925.

 

Le général de division Jean-Baptiste Marchand meurt à Paris le 13 janvier 1934, à l’âge de 71 ans.

 

 

 

Sources :

 

  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Wikipedia.
  • Ce texte – dans sa partie coloniale – a été écrit par Alban Sumpf.
  • Site www.histoire-image.org

 

Les coloniaux : le commandant Marchand.

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