Les Corses dans la guerre d'Indochine.

Publié le 8 Avril 2018

Les Corses dans la guerre d'Indochine.

 

Le soldat d’Indochine.

 

Dans ses recherches, l’historien Michel Bodin a fait le compte et l’analyse des soldats de la métropole et de l’Empire français qui ont combattu en Indochine. Sur le demi-million de soldats, 65.000 étaient des légionnaires, 55.000 des Africains et 110.000 des Nord-Africains. En métropole, ce sont les départements de l’Est, à l’exception de l’Alsace, des Ardennes au Lyonnais, et ceux de l’Ouest, du Cotentin au Périgord, qui ont fourni le plus de soldats au corps expéditionnaire avec ceux de la Corse, du Vaucluse et des Pyrénées-Orientales.

 

Globalement, de nombreux facteurs entrent en compte : les jeunes qui s’engagent ne choisissent pas forcément d’aller en Indochine – même s’ils le peuvent. Ils sont recrutés dans des unités qui sont ensuite désignées pour partir en Indochine. Bien entendu, ceux qui prennent les troupes coloniales savent qu’ils ont plus de chance de partir que les autres.

 

Ce sont les régions les plus défavorisées et à forte natalité qui donnent le plus de soldats. Il n’est pas étonnant non plus que les trois quarts des soldats viennent des milieux modestes, notamment du monde ouvrier. Ils sont, en général, peu qualifiés : près de la moitié n’a pas de diplôme, et ils sont souvent sans profession et chômeurs. Leur engagement s’explique moins par des motifs idéologiques que par des raisons économiques, d’autant que la solde est plus élevée d’un tiers en Extrême-Orient.

 

De plus, les régions d’origine de ces soldats sont en crise : économie non en adéquation avec la démographie : certaines zones ont une population supérieure aux débouchés sur le marché local du travail. Les jeunes choisissent donc de partir. Il y a aussi des traditions familiales comme il y a des traditions locales : les Savoyards sont nombreux à partir vers Paris dans le courant du 19e siècle. Pour toutes les raisons évoquées ci-avant et parce que Paris contient une diaspora savoyarde importante, structurée, qui permet donc l’accueil des nouveaux arrivants.

 

Le cas de la Corse.

 

La Corse est exactement dans cette configuration, à laquelle il convient d’ajouter des spécificités locales. Une démographie soutenue face à une économie centrée sur la sédentarisation : céréaliculture et arboriculture (olivier en Balagne, châtaignier en Castagniccia).

 

Au cours du 19e siècle, l’arrivée des farines venues du continent – moins chères – déstabilise de nombreux producteurs locaux. De plus, les terres cultivables ne sont pas extensibles. De nombreux producteurs de châtaignes décident donc de reconvertir leur production « d’arbre à pain » en « arbre à planches ». Compte tenu du caractère insulaire de la Corse, la révolution industrielle, née de la vapeur, ne s’est pas développée comme ailleurs en France. Les investissements industriels sont rares, pour ne pas dire inexistants.

 

De nombreux Corses décident donc de quitter leur île. Comme les Savoyards ou d’autres populations, la diaspora et le caractère communautaire sont très actifs. « On va dans cet endroit car on sait qu’on aura un relais local » pourrait-on résumer. Si l’exil est réel sur les départements du Var et des Bouches-du-Rhône, de nombreux exemples sont aussi mis en avant – racontés dans les veillées comme dans les cafés – des Corses qui ont réussi dans l’Empire colonial.

 

En Indochine, entre 1900 et 1942, 15 % des Administrateurs sont Corses, comme 20% des personnels de la Justice et de la magistrature. S’il y a de nombreux fonctionnaires corses en Indochine, les exemples sont légions dans les domaines de la presse, de l’enseignement, mais aussi du commerce, de l’hôtellerie et des plantations d’hévéas.

 

Pierre Pucci.

 

Pierre Pucci est l’un de ces exemples. Installé à Issy-les-Moulineaux au moment de son incorporation, il s’engage dans l’armée de terre et intègre les troupes coloniales, à savoir le 6e régiment de tirailleurs algériens (6e RTA) dont le casernement est situé à Tlemcen, dans l’Oranais en Algérie.

 

Le régiment est de toutes les batailles de la Première Guerre mondiale, puis de la Guerre du Rif au Maroc (1925-1926) et de la Seconde Guerre mondiale. Comme la majeure partie des unités coloniales, le 6e RTA fait plusieurs séjours en Indochine.

 

Le 21 décembre 1951, alors qu’il est en opérations au Tonkin, le sergent-chef Pierre Pucci est tué au combat, à Phuong-Mao. Il avait 37 ans.

 

Son nom est inscrit sur le monument aux Morts de la ville d’Issy-les-Moulineaux, comme également sur celui de sa commune de naissance, Livia, en Corse.

 

 

 

 

Sources :

 

  • Encyclopédie Larousse.
  • Encyclopédie Britannica.
  • Encyclopédie Wikipédia.
  • Travail universitaire sur les migrations corses, par Fernand Nicolas, sous la direction du professeur Pomponi.
  • Site : www.patincoufin.org
  • Michel Bodin : Soldats d’Indochine, Ed. Recherches asiatiques ; Soldats d’Indochine, 1945-1954, Ed. Outre-Mers – Revue d’histoire, 1998.
  • Georges Fleury, La Guerre en Indochine, Perrin, 2000.
  • Recherches dans les archives des Bulletins de l’Ecole français d’Extrême-Orient d’archéologie.

 

Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #Indochine

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