Publié le 4 Mars 2011
« Je m’appelle Louise Zazzera et j’habite à Issy-les-Moulineaux depuis 1995. Ma famille était parisienne. Mon arrière grand-père, lorrain, a dû quitter la Lorraine suite à la défaite de 1870 et à son choix de demeurer français. Il s’est installé à Paris avec mon arrière grand-mère.
C’est à titre individuel que j’ai adhéré à votre Association «Le Souvenir Français». Dans notre département des Hauts de Seine, je suis la trésorière d’une association : l’ANPNOGD92, qui est l’Association Nationale des Pupilles de la Nation et des Orphelins de Guerre et du Devoir.
Je souhaite d’abord me présenter avant de vous parler de notre association. Je suis pupille de la Nation, mon père est reconnu mort pour la France. Il est revenu des camps de prisonnier de guerre en mars 1942. Il faisait partie des prisonniers qui ont été renvoyés dans leur pays car très malade. Il est décédé le 13 aout 1942, après de longs séjours à l’hôpital et de grandes souffrances. Il avait 29 ans. Il a laissé deux enfants de 6 et 3 ans et sa femme enceinte de moi qui suis née le 5 décembre 1942. Ma maman me disait : «tu es le dernier cadeau que ton papa m’a fait» !
On reconnaît et on ne veut pas oublier tous ces hommes et ces femmes morts pour leur patrie. Mais connaît-on la douleur de ces enfants dont les familles sont détruites, de ces enfants qui n’ont jamais connu leur père, leur mère ?
Voyez-vous, j’ai une phrase qui reste dans ma tête. Je pense que la personne l’a prononcée à la légère, mais elle m’a marqué et je l’entends encore. Cela s’est passé à l’école. Dans la classe, la maîtresse faisait l’appel pour le paiement de la garderie du soir et elle a dit « ah oui, toi tu ne payes pas, tu es pupille de la Nation». Je ne comprenais pas très bien ce que cela voulait dire mais pour moi je n’étais pas normale, j’étais fautive !
Je suis adhérente à l’ANPNOGD. Pour entretenir la mémoire de ceux et celles qui sont morts, et que la Patrie a reconnu «Morts pour la France». Mais également que l‘on reconnaisse la souffrance des enfants appelés Pupilles de la Nation.
Notre association compte environs 70 Délégations départementales, regroupant 9.500 adhérents. Nous défendons un double objectif : perpétuer le Devoir de Mémoire envers les disparus et œuvrer pour la promulgation d’un statut qui devra s’inspirer largement de celui promulgué en faveur des enfants des déportés ; en juillet 2000, la France a réparé le préjudice subi par les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; quatre ans plus tard, les orphelins dont les parents ont été victimes de la barbarie nazie morts en déportation, fusillés ou massacrés pour des actes de résistance ou pour des faits politiques, percevaient à leur tour des réparations. Puis, en février 2005, notre pays réparait le préjudice subi par des orphelins dont les parents ont été victimes d’événements liés au processus d’indépendance de ses anciens départements et territoires, les Harkis principalement.
Soixante-cinq ans se sont écoulés depuis la libération de la France et il est temps de ne pas oublier l’indispensable Devoir de Mémoire en remédiant à la discrimination résultant des décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004, pour le concept d’équité conserve tout son sens.
Ces « Oubliés de l’Histoire» demandent, au regard de l’article 1 de notre Constitution qui assure l’égalité devant la loi de tous les Citoyens et de l’article 6 des Droits de l’Homme, selon lequel tous les Citoyens sont égaux aux yeux de la loi, que la République Française reconnaisse tous ses «Morts pour la France» sans laisser quiconque au bord de la route.
Nous croyons que notre Association, l’ANPNOGD, est porteuse d’un flambeau qui ne doit pas s’éteindre, il est fait de souvenir, de sacrifices suprêmes pour la liberté et la Patrie ! C’est pourquoi nous demandons le respect et la reconnaissance, pour tous ces enfants du sacrifice, devenus les oubliés de la Nation. Cela implique que les Pupilles de la Nation, les Orphelins de Guerre ou du Devoir qui ont été privés de la présence d’un père ou d’une mère, obtiennent réparation de la part de l’Etat dans un esprit d’équité et de justice. »
Louise Zazzera.