Publié le 30 Mars 2024
Sur ce site du Comité du Souvenir français d’Issy-Vanves, nous avons déjà évoqué les traités issus des conséquences de la Première Guerre mondiale. Des articles ont été publiés sur les Accords Sykes-Picot (en 2015) et sur le traité de Sèvres en 2019.
Exposé de la situation.
Pour mémoire, ces accords, signés en 1916 entre la France et la Grande-Bretagne visaient à partager le Proche-Orient en plusieurs zones d’influence : le Liban et la Syrie à la France, la Palestine, l’Irak, le Koweït, la Jordanie et Jérusalem à la Grande-Bretagne. L’histoire est connue, de même que les indépendances qui ont suivi tout au long du 20e siècle.
En 1920, le Traité de Sèvres était signé. Il prévoyait également d'imposer à l'Empire ottoman de sévères reculs territoriaux au sein même de l’Anatolie. À l'ouest, la Thrace orientale, sauf Constantinople et ses abords, était cédée à la Grèce. À l'est, l'indépendance d'une grande Arménie était reconnue et une province autonome kurde créée.
Le Traité de Lausanne.
En fait, au lendemain de la Première Guerre mondiale, l’Empire ottoman est vaincu. Mustapha Kemal, à la tête de l’armée, entreprend de libérer son pays, la Turquie, du sultanat (guerre civile) puis combat les Français, les Arméniens et enfin les Grecs. L’Etat de grande Arménie n’existera jamais et les Grecs sont refoulés sur la rive ouest de la mer Egée (ils y conserveront néanmoins toutes les îles).
Le 20 novembre 1922, à Lausanne, en Suisse, une nouvelle conférence de la paix s’ouvre. L’Italie est représentée par Mussolini, la France par Poincaré et la Grèce par Venizélos. Ismet Pacha est le délégué de la toute jeune République turque. Fort de ses victoires militaires, Mustapha Kemal transmet ses ordres qui vont pratiquement tous être acceptés :
- Les Turcs récupèrent une pleine souveraineté sur Istamboul et son arrière-pays européen ainsi que sur l'Arménie occidentale, le Kurdistan occidental et la côte orientale de la mer Égée (Smyrne, Éphèse...).
- Les troupes françaises qui s'étaient installées en Cilicie, au sud, ne conservent plus qu'une enclave majoritairement arabe, la région d’Alexandrette et Antioche, qu'elles évacueront en 1939 et remettront à la Turquie, en violation du droit international.
- La frontière avec l'Irak est dessinée en pointillé : les Britanniques occupent le nord de l’Irak (la région de Mossoul). Région également revendiquée par les Turcs du fait d’une population turcophone importante. Mais ces derniers n’obtiennent pas gain de cause à la Société des Nations et les Britanniques conservent leur possession.
Néanmoins, la majeure partie des régions turcophones d’Anatolie revient à la Turquie. Cela va inspirer un certain Adolf Hitler, qui va développer la théorie du pangermanisme.
A noter également, la disparition pure et simple de la revendication du peuple kurde d’avoir une région autonome, telle que promise au Traité de Sèvres.
Enfin, le traité institue des échanges de populations obligatoires entre la Grèce et la Turquie : 1,6 million de Grecs ottomans contre 385 000 musulmans de Grèce. Ces échanges forcés ont débuté « baïonnette dans le dos », bien avant la signature du traité en . Près d'un demi-million de Grecs de Turquie meurent, pour la plupart dans les camps ou en route. Des exceptions seront mises en place, mais ces populations vont faire l’objet de discriminations grandissantes : aujourd’hui, il y a peut-être environ 130 000 musulmans en Grèce et seulement quelques milliers de Grecs en Turquie.
Des événements passés (île de Chypre coupée en deux) ou actuels (tensions gréco-turques) trouvent une partie de leur explication dans ces traités issus de la Première Guerre mondiale. Sans même citer des revendications territoriales, culturelles ou linguistiques terriblement proches de nous…
Sources :
- Archives du Souvenir Français.
- Encyclopédie Wikipédia.
- Site Hérodote : www.herodote.net
- Jacques benoits-Méchin, Mustapha Kémal ou la Mort d'un empire, France, Ed. Albin Michel, 2014.
- Yves Ternon, les Arméniens, histoire d’un génocide, Seuil, 1977.