Rue Ernest Renan, début du 20ème siècle. L'Institut Saint-Nicolas se trouve sur la gauche de la rue.
« Le Jour de deuil de l’Armée allemande »
Au printemps de l’année 1918, l’Armée allemande profite de l’armistice qu’elle vient de signer avec la nouvelle Russie bolchévique pour transférer sur le front ouest des dizaines de milliers de soldats. Une offensive générale est déclenchée et les lignes françaises sont enfoncées en Picardie, en Champagne et sur la Marne. Après un instant de panique et d’hésitation, une contre-offensive est décidée et menée rapidement, sous le commandement militaire du général Foch et politique de Clémenceau. Le reflux des troupes du IIème Reich est immédiat et il s’en faut de peu que des divisions entières ne soient encerclées.
Le renfort des américains accélère l’offensive alliée. La situation devient si grave que le général Ludendorff, n’hésite pas à nommer la journée du 8 août 1918 comme « le jour de deuil de l’Armée allemande ».
Quelques semaines plus tard, des pourparlers sont engagés entre les Américains et les Allemands. Ils discutent du projet du président des Etats-Unis, Woodrow Wilson. Ce plan en 14 points consiste, notamment, à mettre fin aux hostilités par l’évacuation des territoires occupés ou annexés, à assurer la liberté de navigation et du commerce, à créer une association des nations (qui deviendra la Société des Nations).
Dans le même moment, l’empereur Guillaume II nomme un nouveau chancelier, le prince Max de Bade. Mais ce dernier n’arrive pas à enrayer le flot de colère du peuple germanique. De nombreux soldats et ouvriers refusent de retourner au combat ou de continuer à travailler pour la « machine de guerre ». L’Empire allemand est à l’agonie.
Colmar, Novembre 1918 : défilé d'artilleurs de campagne.
« Novembre 1918 »
Le 7 novembre, des émissaires allemands demandent à rencontrer des représentants du Grand Quartier Général français. Pendant trois jours, les émissaires du IIème Reich tentent d’imposer des conditions honorables, mais elles sont repoussées par les Français. Le 9 novembre, Max de Bade conseille à Guillaume II d’abdiquer et de se réfugier aux Pays-Bas. La république est proclamée, accueillie par une foule en liesse dans les rues de Berlin.
Dans le même moment, Louis Nicolas se meurt à l’hôpital temporaire d’Issy-les-Moulineaux, dans l’Institut Saint-Nicolas.
Le soldat de 2ème classe Louis Nicolas est né le 27 octobre 1872 à Plaisians dans la Drôme provençale. Au commencement de la guerre, il intègre le 118ème régiment d’Artillerie lourde. A l’époque, cette arme se caractérise par des canons imposants comme des 95 de campagne (le chiffre indique le diamètre des obus en mm), des 105, des 150, des 155, tirés par des quatre chevaux, ou des engins encore plus puissants tels des 240 ou 400, placés sur des rails de chemins de fer.
Canon Rimailho de 155.
A l’image de la plupart des régiments d’artillerie lourde, le 118ème est composé de plusieurs Groupes, eux-mêmes formés d’un Etat Major et de une à trois Batteries. Chaque Groupe peut être affecté à un Corps d’Armée différent et intervient soit pour des offensives soit pour couvrir des actions de repli stratégique. C’est le cas du 1er Groupe au moment de la Seconde bataille de la Marne, au cours de l’été 1918. On peut supposer qu’à l’occasion des combats dans le secteur, Louis Nicolas est tombé malade. Rapatrié dans un hôpital proche, celui de l’Institut Saint-Nicolas d’Issy-les-Moulineaux, il y meurt le 10 novembre 1918. Louis Nicolas est le dernier militaire à rendre son âme à Dieu, à Issy-les-Moulineaux, pendant la durée des combats de la Première Guerre mondiale.
Le lendemain, à 5 heures du matin, l’armistice (initialement pour une durée de 36 jours) est signé, à Rethondes, dans le wagon du maréchal Foch. Les combats doivent cesser le jour même, onzième jour du onzième mois à 11 heures.
L’armistice vient d’être signé dans le wagon de Rethondes.
« Clémenceau à la Chambre »
Le 11 novembre, à 16 heures, avec la force de ses 77 ans, Georges Clémenceau, président du Conseil, s'avance d'un pas lourd et grave. Une à une, il monte les marches pour se rendre au pupitre de la Chambre des représentants (Assemblée nationale).
« Messieurs, je cherche vainement ce qu’en une pareille heure, après cette lecture devant la Chambre des représentants français, je pourrais ajouter. Je vous dirai seulement que, dans un document allemand et dont, par conséquent, je n’ai pas à donner lecture à cette tribune en ce moment, document qui contient une protestation contre les rigueurs de l’armistice, les signataires dont je viens de vous donner les noms reconnaissent que la discussion a été conduite dans un grand esprit de conciliation. Pour moi, la convention d’armistice lue, il me semble qu’à cette heure, en cette heure terrible, grande et magnifique, mon devoir est accompli. Un mot seulement. Au nom du peuple français, au nom du Gouvernement de la République française, j’envoie le salut de la France une et indivisible à l’Alsace et la Lorraine retrouvées. »
Georges Clémenceau.