1870-1871

Publié le 2 Juin 2012

Fortifications de la porte de Versailles (Paris)

Fortifications de Paris en 1870 à la Porte de Versailles.

 

 

2 – Paris fortifié ; Paris protégé ?

 

2.1 – Le système de fortification :

 

Après moult tergiversations, recommandations, lois et décrets, une enceinte fortifiée autour de Paris commence à voir le jour en 1841, sous le gouvernement d’Adolphe Thiers. Longue de 33 km, elle comporte 94 bastions, 17 portes, 23 barrières et 8 passages de chemin de fer. A l’extérieur, après une fosse, une bande de 250 m de large est déclarée non constructible ; à l’intérieur, les bastions sont desservis par la rue Militaire et par une voie de chemin de fer, rapidement surnommée « Petite Ceinture ». Au passage, les villages de Montmartre, La Villette, Belleville, Charonne, Bercy, Montrouge, Vaugirard, Auteuil, Passy et des Batignolles sont annexés.

 

L’enceinte de Paris est complétée par une série de forts judicieusement placés sur des axes principaux ou au croisement d’axes principaux. Ainsi, à Saint-Denis, grande ville industrielle, la situation du Fort de la Double-Couronne permet le contrôle de la Route nationale 1 et de la Route nationale 14 ; à Maisons-Alfort, le Fort de Charenton (le fort prend le nom de la ville qu’il doit défendre) est situé entre la route nationale 6 (route de Genève) et la route nationale 19 (route de Belfort). Ces ouvrages doivent permettre d’une part de stopper toute colonne se dirigeant sur la capitale (une colonne comporte des dizaines de milliers d’hommes, de chevaux et de voitures, donc doit prendre des axes principaux) ; d’autre part, les forts sont aussi là pour empêcher tout bombardement grâce à l’action de leur propre artillerie. Autour de la capitale les forts sont au nombre de 16 :

 

- Forts de la Briche, de la Double-Couronne, de l’Est à Saint-Denis.

- Fort d’Aubervilliers à Aubervilliers.

- Fort de Romainville aux Lilas.

- Fort de Noisy à Romainville.

- Fort de Rosny à Rosny-sous-Bois.

- Fort de Nogent à Fontenay-sous-Bois.

- Fort de Vincennes à Vincennes.

- Fort de Charenton à Maisons-Alfort.

- Fort d’Ivry à Ivry-sur-Seine.

- Fort de Bicêtre au Kremlin-Bicêtre.

- Fort de Montrouge à Arcueil.

- Fort de Vanves à Malakoff.

- Fort d’Issy à Issy.

- Forteresse du Mont Valérien à Suresnes.

 

2.2 – Le fort d’Issy :

 

Le Fort d’Issy est situé dans le sud de l’actuelle commune d’Issy-les-Moulineaux, à environ 4 km de l’ancien mur sud d’octroi de Paris.

 

Construit entre 1840 et fin 1841, il présente, comme la plupart des forts autour de la capitale, une forme en étoile, héritée des principes du maréchal Vauban sous Louis XIV. Par l’ouest depuis Saint-Denis et jusqu’à Nogent, les forts sont placés sur des hauteurs pour des raisons de surveillance et de défense. Fait de briques, de terre, avec des redoutes, le fort d’Issy a une importance capitale car il supplée le manque de fortifications entre Auteuil et Issy du fait du lit de la Seine (quartier du Point du Jour). Dans son ouvrage remarquable, Issy-les-Moulineaux, histoire d’une commune suburbaine de Paris (à compte d’auteur en 1977), Alain Becchia, professeur d’histoire géographie indique ceci : « Il est facile d’imaginer ce que cela représenta pour le bourg : des expropriations importantes touchant plusieurs carrières et de nombreuses vignes ; des travaux qui durèrent près de deux ans avec une foule d’ouvriers ; l’installation d’une garnison avec tout ce que ceci implique, bien que l’effectif en soit réduit ; une modification importante du paysage enfin, l’ouvrage couronnant la partie la plus haute du finage, affirmant en quelque sorte la présence de plus en plus envahissante de Paris, tandis que la limite communale était désormais matérialisée du côté de Vaugirard par de profonds fossés en eaux ».

 

2.3 – Troupes françaises dans Paris :

 

Plus de 200.000 hommes en armes sont dans Paris. La capitale peut compter sur des troupes aguerries comme les soldats des 34 et 35ème régiments d’infanterie de ligne, les marins canonniers sous les ordres de l’amiral La Roncière-Le Noury et les troupes spéciales du train, de la gendarmerie et des douanes. Il y a aussi les unités de la Garde nationale. Mais elle est composée d’hommes rappelés, équipés et formés hâtivement. On y rencontre des ouvriers, des commerçants, des manutentionnaires… Tous les âges, toutes les habitudes se côtoient dans une mêlée indescriptible. Certaines unités votent l’élection des officiers, d’autres se préoccupent plus de politique que du maniement des armes, pour d’autres encore l’expérience du feu est tellement limitée que personne ne veut se porter garant de la tenue de la troupe au combat !

 

2.4 – Renforcement des défenses :

 

Dès la proclamation du gouvernement d’union nationale, une action majeure est dirigée vers la défense de la capitale. Maintenant que Napoléon III est fait prisonnier, l’objectif des Prussiens est clair : qui entre dans Paris met la France à genoux. Les enceintes sont donc renforcées, les forts qui ne sont pas achevés sont abandonnés.

 

3 – Première bataille de Châtillon.

 

3.1 – L’arrivée des Prussiens :

 

Donc, alors que le siège de Metz est en cours et que les combats continuent dans le nord, l’est et bientôt sur la Loire, les premiers éléments prussiens s’établissent aux portes de Paris vers le 15 septembre. Il ne s’agit pas d’entrer immédiatement dans la capitale : Bismarck et von Moltke décident de former une sorte de ceinture à environ une dizaine de kilomètres de la capitale. Un bon siège, qui dure et qui affame les Parisiens, est la tactique retenue. D’abord peu nombreuses, les troupes allemandes sont bientôt fortes de plus de 150.000 hommes. Au fur et à mesure des victoires, donc de la libération d’unités, elles se renforcent pour arriver à la fin de l’année 1870 à plus de 200.000 hommes.

 

Les armées prussiennes arrivent sur Paris en deux colonnes : la première passe par l’actuel Val d’Oise (Ecouen) et se dirige vers Le Bourget ; la seconde fait le trajet depuis les Ardennes et passe par le sud de la région parisienne (Corbeil). Quelques semaines plus tôt, il était question de la grandeur de l’Empire français. Ses ennemis ne sont plus qu’à deux lieues, trois au plus !

 

Le général Exéa organise une reconnaissance offensive : il s’agit d’aller au contact de Bavarois signalés vers Choisy-le-Roi. Des combats ont lieu sur la route entre cette ville et Versailles. Nos troupes se contentent de contenir les ennemis… qui occupent le 18 septembre les villes de Bourg-la-Reine, Clamart et Meudon. Bientôt Versailles est prise sans combats.

 

Pour éviter que le cercle ne se referme autour de Paris, et que les forts de Clamart et de Châtillon ne tombent aux mains de l’ennemi (le fort de Châtillon, situé sur une butte, permet de bombarder tout le sud de Paris), le général Ducrot, qui a succédé à Mac-Mahon au début des combats dans l’est de la France, ordonne une sortie là-aussi en deux colonnes.

 

3.2 – Dans les bois de Clamart et de Meudon :

 

Les troupes sortent de Paris le 19 septembre : la première colonne se dirige vers Montrouge et Bagneux ; la seconde sur les bois de Clamart et de Meudon. A Bagneux, nos hommes sont bousculés par des troupes plus aguerries et plus solides. A Meudon la situation n’est guère meilleure. En-dehors de l’exploit des Zouaves à la ferme du Trivaux, partout les Français reculent. Devant la puissance du feu allemand, les généraux Ducrot et Exéa sont contraints de faire marche arrière. Ils viennent se réfugier aux pieds des forts d’Issy, de Vanves et de Montrouge.

 

De nombreux régiments rentrent dans Paris, où ils sont à peu près certains de se refaire une santé en attendant des jours meilleurs. Pour autant, des unités restent à la pointe du combat comme des compagnies du 150ème régiment de marche, au Plessis-Piquet (bientôt Plessis-Robinson).

 

A Montretout (Saint-Cloud), compte tenu de l’inachèvement des fortifications, la redoute est abandonnée à l’ennemi. Sur toutes les hauteurs dominant aussi bien le sud de la capitale que le nord, les Prussiens s’installent et placent leurs batteries. Pendant quelques jours, alors que de part et d’autre on installe les campements et les Etats-majors, des escarmouches ont lieu entre escouades : à Vanves, une compagnie d’éclaireurs tombe nez-à-nez avec un peloton de tirailleurs bavarois.

 

Au devant du fort d’Issy, en reconnaissance, 120 hommes du 4ème bataillon de la Seine ont maille à partir avec l’ennemi. Le 24 septembre, les canonniers isséens prennent pour cibles les batteries allemandes placées sur les hauteurs de Sèvres. Quatre jours plus tard, le général Blanchard fait passer ses hommes du 13ème bataillon de marche par Issy avant de se rendre au parc Fleury. Il s’agit de valider les positions ennemies installées sur la terrasse du château de Meudon.

 

Le 29 septembre, alors qu’une bataille importante se déroule entre L’Hay-les-Roses et Chevilly, Blanchard organise une nouvelle reconnaissance sur Issy et le Bas-Meudon : il convient de montrer des forces aux troupes ennemies et de les contenir sur cette partie du front, somme toute fragile : la Seine est difficile à garder et constitue l’un des points faibles de la défense de Paris.

 

 

Bavarois plateau de chatillon

 Bavarois sur le plateau de Châtillon.

 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #1870-1871

Publié le 26 Mai 2012

ReichshoffenMorot1870
La charge des cuirassiers à Reischoffen.
1 – L’humiliante défaite.
 
1.1 – Une double méprise :
 
La guerre franco-prussienne est principalement liée à une double méprise : diplomatique et militaire.
 
Diplomatique : en 1815, au Congrès de Vienne, la Prusse, l’un des vainqueurs de Napoléon 1er, a pris une place prépondérante en Europe. Le roi Frédéric-Guillaume III de Hohenzollern, aidé entre autres du général Carl von Clausewitz (auteur du traité fameux De la Guerre), a transformé son royaume en favorisant une administration de premier plan et une importante industrie. Son fils, Frédéric-Guillaume IV, lui succède en 1840. Mais, atteint d’une maladie mentale, le jeune homme est secondé par son frère Guillaume 1er à partir de 1858. Frédéric-Guillaume IV meurt en 1861. Guillaume est proclamé nouveau roi de Prusse. Il sait s’entourer d’hommes remarquables, à commencer par son ministre-président Otto von Bismarck.
 
L’idée majeure du ministre-président consiste à réunir autour de la Prusse les anciens Etats du Saint-Empire germanique : au sud, la Bavière, et à l’ouest, le Hesse, le Bade et le Wurtemberg. Mais ces derniers soutiennent l’Empire autrichien plus que la Prusse. En 1866, à l’occasion de la guerre austro-prussienne, les Autrichiens sont aisément battus à Sadowa. L’industrie militaire prussienne a fait merveille… Il s’agit maintenant pour Bismarck de renforcer le nouveau conglomérat d’Etats pour en faire une nation. A l’époque, il n’est pas forcément question que d’économie, de mesures budgétaires ou de monnaie. « Rien de tel qu’une bonne guerre » selon l’expression des anciens ! Et quelle meilleure excuse qu’une épreuve contre l’ennemi héréditaire : la France.
 
En France, la monarchie traditionnelle de Louis XVIII puis de Charles X a laissé la place à un régime parlementaire et libéral avec Louis-Philippe, roi des Français. Ce n’est pas encore assez : un fort vent de liberté souffle en continu sur le pays. La Deuxième république est proclamée en 1848. Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon 1er, est élu. Trois années plus tard, en 1851, il dissout l’Assemblée nationale et met en place un régime autoritaire. Le 2 décembre 1852, il se fait plébisciter comme Empereur des Français, sous le nom de Napoléon III.
 
 En 1870, le trône d’Espagne, vacant, donne lieu à une compétition entre plusieurs princes d’Europe. Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen pose sa candidature. Il n’est pas envisageable pour la France de se trouver en quelque sorte coincée entre des Hohenzollern à l’est et au sud ! Napoléon III fait envoyer des émissaires en Prusse afin de demander le renoncement à cette candidature. Guillaume accepte. La France veut plus : il s’agit pour les Prussiens d’y renoncer pour toujours. Refus de Guillaume. A l’occasion d’un troisième déplacement de Benedetti, ambassadeur français, dans la ville allemande d’Ems, Bismarck fait publier une dépêche humiliante pour la France : non seulement son roi n’accepte pas les conditions demandées mais en plus il fait savoir qu’il n’est pas question un instant que l’ambassadeur soit reçu. L’attitude arrogante de la France est brocardée.
 
A Paris, la population descend dans les rues et demande que le camouflet soit réparé coûte que coûte. Et le mieux est encore de donner une bonne leçon aux Prussiens orgueilleux. Les parlementaires et l’entourage de l’empereur français sont également de cet avis. Le 19 juillet 1870, Napoléon III se laisse convaincre et déclare la guerre à la Prusse. A sa grande surprise, il découvre que les Etats de l’Allemagne du sud et de l’Ouest se rangent du côté ennemi, dans une sorte d’enthousiasme guerrier.
 
Méprise militaire : en France, les principes appliqués sont pratiquement tous issus des guerres napoléoniennes. Bien que Napoléon III et son gouvernement aient transformé le pays avec une industrialisation à marche forcée, l’équipement des militaires n’a que peu évolué. Même si le fusil français – Chassepot – est redoutable, les commandes de munitions dépendent d’une manufacture belge dont l’un des actionnaires n’est autre le fils de Guillaume 1er (le Kronprinz). Qui plus est, l’Empire français a confronté ses certitudes guerrières seulement à l’occasion de conflits mineurs, comme au Mexique – ou l’expédition se transforme en tragédie, notamment à Camerone – ou dans le cadre de la colonisation (en Afrique notamment).
 
Les Prussiens n’ont pas la même approche. L’Etat-major de l’armée a envoyé des observateurs sur tous les conflits du monde, à commencer par la Guerre de Sécession aux Etats-Unis. Pour l’armement, l’innovation est l’idée directrice : canons Krupp avec chargement par la culasse ; obus composés de shrapnells (les obus explosent avant d’atteindre le sol et envoient des billes d’aciers dans un rayon d’une centaine de mètres). Par ailleurs, plusieurs régiments sont équipés d’une nouvelle arme automatique et redoutablement efficace : la mitrailleuse.
 
Enfin, si la France peut mobiliser 250.000 hommes, la Prusse en mobilise trois fois plus. Et quand le soldat français a pour première qualité la marche à pied, le soldat allemand est lui transporté sur les lieux des combats grâce au chemin de fer.
 
1.2 – De défaite en défaite :
 
 Estimant être dans leur bon droit – la déclaration de guerre est française – les armées allemandes n’attendent pas et franchissent le Rhin. Napoléon III nomme son épouse, l’impératrice Eugénie, régente et s’en va à Metz, avec le jeune prince impérial – alors adolescent – prendre la tête de l’armée.
 
Le 4 août 1870, les fantassins français sont battus à Wissembourg ; le 6, la cavalerie est à son tour massacrée à Reichshoffen. Les jalousies entre les officiers généraux – Bazaine, McMahon, Frossard – n’arrangent rien. Le 12 août, Napoléon III, malade, doit laisser la direction des opérations au maréchal Bazaine. En dépit de combats acharnés de certaines compagnies, comme à Gravelotte ou à Bazeilles, toutes les unités françaises reculent. Le 18 août, Bazaine doit s’enfermer dans Metz. McMahon monte une nouvelle armée pour dégager la capitale de la Lorraine. Il échoue. Avec l’empereur, il doit se retirer sur Sedan.
 
Dès les premiers assauts, McMahon est blessé. Il est remplacé par les généraux Ducrot puis Wimpffen. Les plans de bataille se succèdent, incohérents, annihilant les sacrifices d’unités comme les Marsouins ou les chasseurs d’Afrique. Le 2 septembre, Napoléon III est fait prisonnier. Il offre à la Prusse près de 100.000 hommes et du matériel en quantité astronomique. La bataille a tué 15.000 Français et 10.000 Allemands.
 
A Paris, c’est l’affolement général : les députés républicains Léon Gambetta, Jules Ferry et Jules Favre vont voter la déchéance de l’Empire français. Le 4 septembre 1870, la Troisième république est proclamée, un gouvernement d’union nationale constitué avec pour maître mot : la défense !
 
Le 29 octobre, c’est au tour du maréchal Bazaine de se rendre : il ouvre les portes de la ville de Metz. Près de 180.000 soldats sont fait prisonniers. C’en est fait de la plus puissante des armées françaises.
 
Sur la Loire, des unités qui s’étaient repliées, sous le commandement du général de La Motte-Rouge, doivent à nouveau reculer, à Artenay devant des Bavarois qui eux protègent leur dispositif au sud de Paris. Gambetta demande la réorganisation de cette « Armée de la Loire » en deux nouvelle unités. Mais elles sont elles-aussi défaites : la première, commandée par Aurelle de Paladine est battue vers Orléans et la seconde – de Chanzy – au Mans.
 
Dans le Nord, après la bataille de l’Hallue, Faidherbe remporte une nouvelle victoire française, à Bapaume, au cours des journées des 2 et 3 janvier 1871. Il contient l’avancée prussienne. Mais le répit n’est que de courte durée car, dès le 19 janvier, ses troupes sont massacrées par les Prussiens à Saint-Quentin. Paris ne sera pas libéré par des troupes venant du nord.
 
 A l’est, les combats sont tout aussi terribles : le général Bourbaki remporte une victoire le 8 janvier 1871 à Villersexel. Mais là encore, cela ne suffit pas :il n’arrive pas à libérer Denfert-Rochereau qui s’est enfermé dans la ville de Belfort (mais qui ne rendra la place qu’après l’armistice et sur ordre exprès du gouvernement de la République). Pire, elle est par la suite battue devant Montbéliard. Bourbaki ordonne alors la retraite vers la Suisse : en accord avec ce pays, près 80.000 soldats français seront internés dans ce pays, ayant été au préalable désarmés au moment du passage de la frontière.
 
Mais, depuis le 11 septembre 1870, les Prussiens sont sur la Marne, à 50 kilomètres de Paris.
 
 
 Bazeille
 
 Les Dernières cartouches (combats de Bazeille) d’Alphonse de Neuville.

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 24 Mai 2012

Napoleon III et Bismarck

Entrevue entre Napoléon III et Bismark à Donchéry, le 2 septembre 1870 (copyright SHD).

 

Le Comité du Souvenir Français d’Issy-les-Moulineaux est heureux de présenter au cours des prochaines semaines, une série de six articles sur la Guerre franco-prussienne et ses implications sur ce qu’étaient à l’époque les villages des Moulineaux et d’Issy.

 

Nous tenons à remercier l’ensemble des personnes qui nous ont aidé dans ses recherches, et à commencer par M. Thierry Gandolfo, conservateur du cimetière d’Issy-les-Moulineaux et Madame et Monsieur Bétry, de la revue Historia et de l’association Historim, pour leur aide précieuse et leurs encouragements.

 

Pour illustrer ces articles, retrouvez les photographies dans l’album intitulé « 013- Guerre franco-prussienne ». Enfin, voici une liste de sources qui nous ont permis d’écrire les articles à venir.

 

Sources :

 

Site de la ville d’Issy-les-Moulineaux : www.issy.com

Encyclopédie en ligne : www.wikipedia.fr et www.larousse.fr

Site sur les fortifications du général Adolphe Séré de Rivière : www.fortiffsere.org

Site de l’association sur l’Histoire et la Recherche d’Issy-les-Moulineaux : www.historim.fr

Travaux du Conseil communal des Aînés.

Xavière Gauthier, La Vierge rouge, Editions de Paris.

Pierre Milza, L’Année terrible, Perrin.

Karl Marx, La guerre civile en France (1871).

Louise Michel, La Commune : Histoire et Souvenirs (1898).

Alain Becchia, Issy-les-Moulineaux, histoire d’une commune suburbaine de Paris, auto-édition.

Philippe Séguin, Louis-Napoléon le Grand, Grasset.

Général Yves Gras, Castelnau ou l’art de commander, Denoël.

Pierre Miquel, La Troisième république, Fayard.

Recherches sur l’historique des dépêches télégraphiques du Gouvernement Thiers.

Extraits du Journal officiel de la République.

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 10 Juillet 2010

Veterans1

 

Vétérans de la Garde nationale et de la Guerre franco-prussienne. Etienne Lalis se tient debout, derrière à droite.

 

 

La Guerre franco-prussienne.

 

Le 2 juillet 1870, l’Espagne dont le trône est vacant depuis la révolution de 1868, confirme l’annonce de la Prusse d’une candidature du prince Léopold de Hohenzollern. L’Empire français ne peut accepter une telle décision qui viendrait à l’entourer de pays favorables à l’expansionnisme prussien. Le 12 juillet, le gouvernement espagnol déclare la candidature fameuse « caduque », mais le lendemain, le chancelier prussien Bismark provoque Napoléon III dans une dépêche : Hohenzollern s’est retiré et le chancelier « n’a plus rien d’autre à dire à l’ambassadeur de l’Empire français ». L’humiliation est accentuée dès le lendemain par une série de caricatures et d’articles dans la presse allemande. Bismarck veut « exciter le taureau gaulois » selon la formule restée célèbre. Poussé par l’opinion publique et une partie de son entourage, Napoléon III déclare la guerre à la Prusse.

 

Les mouvements militaires sont immédiatement déclenchés. Mais, profitant d’un meilleur armement, de forces aguerries et de la pitoyable stratégie des chefs de l’Armée française, les Prussiens défont les troupes de Napoléon III en quelques semaines. Ils se trouvent aux portes de Paris le 19 septembre 1870.

 

 

La guerre d’Etienne Lalis.

 

Madame Batard-Lalis a conservé un précieux document. Il s’agit du Livre d’Or des combattants de 1870-1871 de France et des colonies, publié au début des années 1900.

 

« Ancien sergent-fourrier, du 41ème Bataillon de la Garde nationale de la Seine, M. Lalis n’écoutant que son patriotisme s’engage pour la durée de la guerre. Bientôt, il est nommé sergent-major de la 2ème Compagnie de guerre 1er Bataillon du 13ème régiment de Paris qui occupe le poste avancé du château d ‘Issy. Dans cette position avancée, la Compagnie perd 4 hommes tués et onze blessés.

 

Il assiste également aux engagements avec l’ennemi à la gare aux Bœufs, à Choisy-le-Roi, à la gare de Clamart et au Moulin de pierre.

 

Le 29 décembre 1870, dans l’après-midi en poussant une reconnaissance sous les ordres du capitaine Candon, le sergent-major Lalis découvrit, caché dans une carrière, une certaine quantité de munitions et un outillage servant à la confection des cartouches. Cette carrière était située route de Gardes à Meudon sous la prise d’eau des bains, au lieu dit Les Montalats, carrière Malzac.

 

Ces munitions étaient enfermées dans 200 boîtes de tôle, le tout contenu dans des sacs.

 

Le général Coréard ordonna au lieutenant-colonel Jametel, une sortie de nuit pour aller s’emparer des munitions de guerre. Deux compagnies armées et un nombre d’hommes de corvées se mettaient en marche à 9 heures du soir dans la direction de Meudon.

 

Le capitaine Candon et le sergent-major Lalis guidèrent la colonne, qui marchait en se gardant de l’ennemi, précédée de tirailleurs et de flanqueurs, l’éveil pouvant d’un moment à l’autre attirer l’attention de l’ennemi.

 

Après un travail opiniâtre, nécessitant de grandes précautions, l’expédition rentrait avec les munitions au château d’Issy.

 

L’honneur de cette expédition revenait au capitaine Candon, mais une grande part au sergent-major Lalis qui le premier, signala l’existence de ce dépôt. »

 

Rapport du général Coréard, ordre du jour du 3 janvier 1871 : « Colonel, M. le Commandant en chef de la 3ème armée, a fait connaître à M. le Gouverneur de Paris, les détails de la reconnaissance opérée par le 13ème régiment de la garde mobilisée, sous la direction du colonel Jametel commandant le régiment : dans la nuit du 29 au 30 décembre 1870, le gouverneur a chargé M. le général Commandant supérieur des gardes mobilisés de la Seine, d’être auprès du Régiment et de son chef, l’interprète de sa vive satisfaction pour l’ordre parfait avec lequel cette opération a été conduite, et de féliciter en particulier, M. le capitaine Candon et son sergent-major Lalis qui a le 1er signalé l’existence du matériel ».

 

Le 25 février 1871, Etienne Lalis est nommé agent-comptable, avec rang d’adjudant, pour les 1ère et 2ème compagnies sédentaires et 2ème compagnie de guerre du 41ème Bataillon. Mais le mois suivant, les troupes prussiennes défilent sur les Champs-Elysées.

 

 

 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

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Publié le 20 Mai 2009


Formation musicale.

 

 

 

 

Vincent d’Indy nait à Paris le 27 mars 1851, au sein d’une famille aristocrate, formée de possédants et de militaires, et originaire de la région du Vivarais (sud de l’Ardèche). Les d’Indy sont de ces milieux de la grande bourgeoisie parisienne, qui vouent leur temps aux affaires et aux mondanités. La musique tient une grande place dans leur vie. Antonin, le père de Vincent, est violoniste amateur. Sa grand-mère, Rézia d’Indy, épouse de Théodore d’Indy, chef d’escadron dans la Garde royale, est une pianiste avertie. Elle a suivi les cours de professeurs prestigieux comme Jean-Louis Adam et Kalkbrenner. C’est elle qui assure l’éducation et la formation musicale du jeune Vincent.

 

Entre 1862 et 1870, Vincent d’Indy étudie le piano avec Louis Diémer, l’harmonie avec Albert Lavignac, puis au hasard d’un déménagement avenue de Villars (dans le quartier des Invalides à Paris), la famille d’Indy fait la connaissance du compositeur Henri Duparc. Aîné de trois ans de Vincent, les deux jeunes hommes se lient d’amitié. Leur rencontre est fructueuse et pendant les années 1870, ils travaillent ensemble presque quotidiennement.

 

En 1869, année de l’obtention de son baccalauréat, Vincent d’Indy voyage en Suisse, en Autriche et en Italie.

 

La Guerre franco-prussienne.

 

Mais l’heure est à la guerre. En juillet 1870, l’empereur Napoléon III déclare la guerre à la Prusse. Après quelques semaines, les ennemis sont aux portes de Paris. Vincent d’Indy n’hésite pas et s’engage dans la Garde nationale. Il est affecté au Bataillon 105 qui tient garnison au fort d’Issy. Il n’a pas oublié que sa famille compte de nombreux militaires et il tient lui-aussi, à servir sa patrie comme l’a fait un bon nombre de ses aïeux. Il participe aux combats, avec courage, ce qui lui vaut de recevoir les galons de caporal et une citation. Dans un livre, publié en 1872, intitulé Histoire du 105ème bataillon de la garde nationale en 1870-71 par un engagé volontaire dudit bataillon de dix-neuf ans, il raconte ses souvenirs et pleure la capitulation de l’Armée française : « J’assure que, tous, nous aurions consenti à souffrir encore trois fois plus pour ne pas subir une honte pareille… ».

 

 

Premières œuvres.

 

Même si Vincent d’Indy a déjà publié quelques œuvres à la fin des années 1860, comme les Quatre romances sans paroles, Angoisse, La Chanson des aventuriers de la Mer, sa production démarre après le conflit franco-prussien. Il devient l’élève du grand compositeur César Franck, puis il voyage en Allemagne. Il découvre Franz Liszt et Johannes Brahms. A Bayreuth, on lui autorise, grâce à une porte dérobée, de visualiser, de dos, le grand Richard Wagner.

 

En 1875, Vincent d’Indy épouse sa cousine, Isabelle de Pampelonne. Par la suite, et jusqu’en 1878, il tient plusieurs postes, dont la maîtrise d’orgues de Saint-Leu la Forêt. Il continue à composer et, en 1885, il obtient le Grand Prix de la ville de Paris pour son poème dramatique, Le Chant de la Cloche. Cinq années plus tard, à la mort de César Franck, il est élu président de la Société Nationale de Musique (il en était le secrétaire depuis 1876). Il devient également professeur au Conservatoire de Paris et est fait chevalier de la Légion d’honneur.

 

 

La Schola Cantorum.

 

En 1894, avec ses compagnons Charles Bordes et Alexandre Guilmant, il créé la Schola Cantorum. Au départ, cette école a pour vocation l’étude de la musique religieuse, mais peu à peu, elle devient une école d’enseignement de très haute tenue. Erik Satie, Isaac Albéniz, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Edgard Varèse, Albert Dupuis, en sont élèves. Leur célébrité et leur génie musical sont la meilleure des illustrations des enseignements reçus.

 

A partir de 1904, et jusqu’à sa mort, Vincent d’Indy est le directeur de cette école.

 

Des tournées triomphales.

 

En 1895, Vincent d’Indy réalise des tournées en Espagne, en Belgique, aux Pays-Bas. Il est bientôt fait chevalier du roi Léopold de Belgique ; partout, ce n’est que triomphe et acclamation du public. En 1905, il tourne aux Etats-Unis, à la tête de l’Orchestre symphonique de Boston. Il y interprète des œuvres d’artistes contemporains : César Franck, – qu’il défend avec passion – Gabriel Fauré, Ernest Chausson ou encore Albéric Magnard.

 

Son épouse rend son âme à Dieu la même année. Vincent d’Indy se réfugie encore et toujours dans le travail. En même temps, il prépare des représentations à l’Opéra de Paris, étudie des musiques religieuses comme la messe en si de Jean-Sébastien Bach, et compose des opéras et autres pièces.

 

En 1912, il est fait officier de la Légion d’honneur. Il devient membre de l’Académie royale d’Angleterre, de la Société pour la Promotion de la Musique aux Pays-Bas, de la commission pour l’enseignement de la musique de la ville de Paris. Il est aussi membre du jury du Conservatoire de musique de Lyon, entre 1906 et 1922.

 

Pendant la Première Guerre mondiale, il reste à Paris, avenue de Villars, dans cet appartement qu’il habite depuis sa tendre enfance. Il fait la connaissance de Caroline Janson, une jeune pianiste (trente-six ans les séparent) qui devient élève avant de l’épouser en 1920. Le couple fait construire une villa, à Agay, sur les bords de la Méditerranée. Vincent d’Indy délaisse alors le château familial des Faugs à Boffres en Ardèche.

 

Vincent d’Indy continue, pendant les dernières années de sa vie, à mêler composition et enseignement musical, défendant une certaine « moralité » de l’œuvre artistique. Il s’éteint à Paris, le 2 décembre 1931. Apprenant sa mort, le journaliste du Journal de Genève, Henri Gagnebin indique : « Et maintenant l’infatigable travailleur prend son repos ».

 

Œuvres.

 

Parmi les nombreuses œuvres de Vincent d’Indy, il convient de noter : La Forêt Enchantée, Jour d’été sur la montagne, Wallenstein, en musique orchestrale ; des Sonates pour piano, pour violon et violoncelle, en musique de chambre ; Le Chant de la Cloche, en musique vocale ; Attendez-moi sur l’orme, Le Rêve de Cinyras ou encore la Légende de Saint-Christophe, parmi les cinq opéras composés par ses soins.

 

Des disques d’œuvres de Vincent d’Indy sont disponibles, aux Editions EMI ou Erato.

 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #1870-1871

Publié le 14 Février 2009

 

Ce monument, placé proche de l’entrée du cimetière d’Issy-les-Moulineaux est dédié à la mémoire de quatre gardes nationaux d’Issy, morts en 1871. Il s’agissait de Messieurs Dufour, Legru, Hervieux et Duval. Ils appartenaient au 41ème bataillon de la Garde. Le monument a été édifié par souscription patriotique.

 

 

La Garde nationale et la Guerre franco-prussienne. 

Sous le Second Empire, la Garde nationale se voit confirmée dans ses prérogatives. Les officiers prêtent serment à l’empereur Napoléon III. En 1868, la loi Niel créé une Garde nationale mobile chargée de défendre les frontières. Celle-ci est principalement mise en œuvre pour appuyer l’armée contre la montée de l’expansion prussienne.

 

Au moment de la déclaration de guerre, la Garde nationale n’est que peu mobilisée. Seuls les ressortissants du Nord et de l’Est de la France sont incorporés à l’armée. Après les premières défaites, de nouveaux gardes sont appelés. Des régiments d’infanterie sont formés.

 

Arrivent le désastre de Sedan et la capture de l’Empereur : un gouvernement de la défense nationale est institué. Tous les gardes nationaux sont alors employés. Entre autres, ils participent au siège et à la défense de la capitale. En cela, on peut indiquer que la Garde nationale s’est transformée en dernier rempart contre l’envahisseur prussien.

 

Le Comité central de la Garde nationale. 

Cependant, dès la fin de l’année 1870, de nombreux gardes nationaux sont séduits par la propagande révolutionnaire et l’idéal anarchiste. Des comités se créent, des bataillons se soulèvent contre le gouvernement légitime. Celui-ci est incarné par Adolphe Thiers. En janvier 1871, après l’échec de la tentative de percée du front prussien à Buzenval, près de Rueil-Malmaison, l’armistice est signé. Le gouvernement, qui s’était réfugié à Bordeaux se rapatrie à Versailles, d’où le nom de « Versaillais » pour ses fidèles.

 

Le 1er mars, les Prussiens défilent sur les Champs-Elysées. Le surlendemain, le Comité central de la Garde nationale est constitué par des membres de la Délégation des vingt arrondissements de Paris (elle-même conçue en janvier 1871). Ce comité demande aux habitants de la capitale de ne pas céder à l’appel du gouvernement Thiers de négocier la paix avec les Prussiens et pousse à l’armement des parisiens pour « protéger le pays mieux que n’ont pu le faire jusque là les armées permanentes et à défendre, par tous les moyens possibles, la République menacée ».

 

Le Comité central s’installe à l’hôtel de ville de Paris et nomme des délégués pour l'administration municipale : Jourde et Varkin sont aux Finances ; Grollier et Vaillant à l’Intérieur ; Grousset aux Relations Extérieures ; Duval et Rigault à la Préfecture de Police ; Eudes à la Guerre ; Bergeret à l’Etat-major de la Garde nationale et Moreau dirige le Journal Officiel, organe de propagande. Les maires des arrondissements sont remplacés et peu à peu des quartiers se soumettent.

 

La Commune. 

Après les élections du 26 mars 1871, le Comité central cède la place à la Commune. Il demeure néanmoins sous son existence propre et conserve sa mission de la défense de Paris. Le mouvement insurrectionnel prend un certain nombre de décisions en faveur du « petit peuple » de Paris, ce qui provoque des troubles et le départ d’une partie de la population des quartiers chics de la capitale. Des bataillons de la Garde appuient ces décisions.

 

Mais la Commune se transforme rapidement en une sorte de « dictature du prolétariat ». Tous ceux qui soutiennent le pouvoir légitime sont susceptibles d’être passés par les armes ; des journaux « pro-versaillais » sont interdits ; les arrestations et exécutions sommaires se multiplient. Le gouvernement Thiers ne peut plus laisser faire. Après avoir adressé un ultimatum aux Parisien, les Versaillais profitent d’une trahison et entrent dans la capitale par la Porte de Saint-Cloud. Pendant une semaine, appelée la « Semaine sanglante » les combats sont acharnés entre les deux camps. A la fin du mois de mai 1871, la Commune est anéantie. Ses partisans, quand ils ne sont pas morts en combattant, sont fusillés, enfermés ou déportés, principalement en Nouvelle-Calédonie. 

 

La fin.

 

A la suite des événements de la Commune de Paris, la Garde nationale est dissoute le 25 août 1871, à Paris, comme dans toutes les communes de France…
 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #1870-1871

Publié le 10 Février 2009

 

 

Cet étrange obélisque est dédié à la mémoire d’Honoré Richard, né le 15 mai 1811, à Issy et Auguste Marie, né également à Issy, le 9 juillet 1811. Ils sont tous les deux morts en 1848. Ils étaient « gardes nationaux ».

 

 

 

Genèse.

 

L’origine de la Garde nationale remonte à la Révolution française. Elle désigne la milice de citoyens formée dans chaque commune. Fondée sur le principe de la Garde bourgeoise de la royauté, elle a pour mission la protection des biens et des personnes, entre autres en réprimant le pillage et en assurant la distribution de pains et de blé dans les moments difficiles.

 

A Paris, au moment de la prise de la Bastille, le roi Louis XVI reconnaît le marquis de La Fayette comme commandant en chef de la garde parisienne. Pour autant, il s’agit de ne pas laisser le pays se doter de cohortes qui pourraient devenir incontrôlables. L’article 12 de la constitution de 1789 indique : « La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée ». Et dans la foulée, les députés demandent aux gardes nationaux de prêter serment sur cette même constitution. Cela n’évite cependant pas, ça et là, quelques débordements et règlements de comptes…

 

En 1792, puis l’année suivante, après l’exécution du roi, la France est attaquée à ses frontières. En appui de l’armée, la Garde nationale est réquisitionnée et envoyée combattre. Il arrive que des membres de la Garde, plutôt aisés, payent de jeunes hommes pour les remplacer au moment de ces campagnes militaires.

 

Sous le Consulat puis l’Empire.

 

Sous Bonaparte, la Garde nationale est réservée à des rôles subalternes, comme le maintien d’un certain ordre à l’intérieur des frontières. Le Premier consul se méfie de ces milices qui peuvent soulever les citoyens d’une commune ou d’une région et marcher contre l’ordre établi.

 

Sous l’Empire, la Garde nationale sert à nouveau de réservoir à hommes au gré des besoins des campagnes militaires. En 1806, Napoléon 1er réaffirme par décret l’obligation pour tous les Français, âgés de 20 à 60 ans d’effectuer le service de la Garde nationale. En 1809, face à un débarquement anglais ayant échoué de justesse sur les côtes des Pays-Bas, alors sous administration française, l’Empereur confie à la Garde la surveillance des côtes et des frontières. En 1813 et 1814, la Garde participe activement à la défense du pays contre l’invasion des Prussiens et des Autrichiens.

 

 

Sous la Restauration et la Monarchie de Juillet.

 

Le 15 mai 1814, le comte d’Artois est nommé colonel général des gardes nationales ; celles-ci redeviennent sédentaires et reprennent leur rôle de maintien de l’ordre. Après le désastre de Waterloo, la Garde est à peu près la seule force sur laquelle le roi et les préfets peuvent compter. L’armée étant encore nostalgique des grandes épopées qu’elle vient de vivre. En, 1816, le caractère obligatoire de faire le service de la Garde est réaffirmé. A contrario, et toujours pour les mêmes craintes, la Garde de Paris est dissoute en 1827.

 

Le 25 juillet 1830, la roi Charles X publie des ordonnances qui vont à l’encontre de l’esprit de liberté soufflant sur la société française. Celles-ci provoquent la Révolution de Juillet. La Garde de Paris est reconstituée, et La Fayette, à 73 ans, en reprend la direction. Il accueille, à l’hôtel de ville de Paris, Louis-Philippe 1er, nouveau roi, chef de la Maison d’Orléans et cousin de Charles X, chef de la Maison de Bourbon.

 

Encore une fois, la Garde nationale voit son rôle réaffirmé, son importance reconnue. De fait, à plusieurs reprises, elle démontre sa capacité à faire régner l’ordre. Mais, encore une fois, prenant peur du pouvoir des milices, Louis-Philippe demande au ministre de la Guerre, le maréchal Soult, de réorganiser l’armée pour permettre un contrepoids à l’omniprésence de la Garde.

 

 

La Révolution de 1848.

 

Le « roi bourgeois », répondant aux attentes des Français, mène une politique intérieure d’abord libérale avant de se tourner vers plus de conservatisme. Les dix premières années de son règne sont néanmoins agitées par des nombreuses émeutes (insurrection républicaine de 1832, puis tentative d’une insurrection royaliste par la duchesse de Berry la même année ; émeutes populaires de Lyon et de Paris en 1834 ; attentat de Fieschi en 1835 ; insurrections de Barbès et de Blanqui en 1839). En 1840, Louis-Philippe nomme Guizot à la tête du pays : « Enrichissez-vous ! » devient le maître mot. Mais l’opposition demeure active et ses attaques virulentes aboutissent à la révolution de février 1848. Après les premières émeutes, sanglantes, Louis-Philippe abdique en faveur de son petit-fils, le comte de Paris. Le mouvement révolutionnaire balaie cette initiative. La Garde nationale n’intervient pas ou peu.

 

La Seconde République est proclamée par le gouvernement provisoire le 25 février 1848. Mais elle doit faire face à la pression populaire. Des résolutions démocratiques sont prises : droit au travail ; création des ateliers nationaux ; liberté de la presse ; suffrage universel.

 

En mars 1848, un décret indique que « tout citoyen de 21 à 55 ans, ni privé ni suspendu de ses droits civiques est garde national et y exerce le droit de suffrage pour tous les grades d'officiers". Plus tard, en juillet, un nouveau décret affirme que les officiers sont partout, en province comme à Paris, élus au suffrage universel. Dans l’un de ses romans (César Birotteau), Honoré de Balzac montre ainsi l’ascension sociale que connaît un officier de la Garde nationale.

 

Pour autant, de grandes difficultés économiques subsistent. Les Ateliers nationaux, organisation qui fournit du travail à près de 115.000 chômeurs, sont saturés et génèrent pour l’Etat des dépenses exponentielles. Cela ne suffit pourtant pas et la misère se fait partout sentir. De nouvelles émeutes éclatent en mai puis en juin 1848. Celles-ci sont réprimées durement par l’armée et la Garde nationale, bien souvent dirigée par des officiers qui se sont embourgeoisés et n’hésitent pas à faire tirer sur le « petit » peuple de Paris. La rupture est consommée entre les partis de gauche et la Garde nationale…

 

 

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Rédigé par Souvenir Français Issy

Publié dans #1870-1871

Publié le 23 Mai 2008


Napoléon III et Bismark, le 2 septembre à Donchery, entrevue après la bataille de Sedan.

 

 

 

Alors que Guillaume Ier de Hohenzollern, régent de Prusse depuis 1861 en raison de la maladie mentale de Frédéric-Guillaume IV, remporte une victoire décisive sur les Autrichiens à Sadowa le 3 juillet 1866, en France, après la chute de la monarchie orléaniste de Louis-Philippe, la Deuxième République est proclamée et son premier président est Louis-Napoléon Bonaparte. 

Le neveu de Napoléon 1er est élu en décembre 1848. Cette république n’accorde que peu de pouvoirs à son représentant. Dans le but de diviser ses opposants, de mener librement la politique qu’il pense correcte pour le pays et d’accroître son prestige personnel, Louis-Napoléon Bonaparte provoque un coup d’Etat le 2 décembre 1851. Un an plus tard, jour pour jour, il est proclamé Empereur des Français.

Les craintes françaises d’une hégémonie allemande se trouvent rapidement validées par le désir de Bismarck, ministre-président de Prusse, de renforcer l’unité des Etats d’Allemagne du Sud (Bavière, Bade, Wurtemberg et Hesse) dans une grande épreuve nationale. En 1870, la candidature au trône d’Espagne du prince Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen provoque une crise. Il n’est pas question que la France se trouve au nord, à l’est et au sud, entourée d’Etats pro-allemands. A l’occasion d’une rencontre entre la France (représentée par son ambassadeur Benedetti) et la Prusse, dans la ville d’eau d’Ems, Guillaume Ier accepte que le prince retire sa candidature. Mais  Napoléon III veut plus et exige des garanties à cette renonciation. Ce qu’il finit par obtenir. Malheureusement, Bismarck publie un compte-rendu de cette réunion, mais avec une traduction pro-prussienne : l’attitude « arrogante » de l’Empire français est brocardée.

Piqué au vif, l’empereur, plutôt d’abord hostile à un conflit, est vite débordé par un entourage et un parlement favorables à l’ouverture des hostilités. Napoléon III déclare la guerre à Guillaume Ier le 19 juillet 1870. A sa grande surprise, l’empereur français découvre que les Etats de l’Allemagne du sud se rangent du côté de la Prusse, dans une sorte d’enthousiasme guerrier, contre l’ennemi héréditaire.

Les armées françaises sont portées rapidement aux frontières grâce au chemin de fer, issu de l’extraordinaire développement industriel voulu par l’empereur. Ces armées, qui n’ont connu que des guerres de conquêtes coloniales, sont impréparées à un conflit européen, face à un adversaire riche d’un enseignement sur les guerres modernes, recueilli par des observateurs militaires envoyés étudier les nouvelles techniques et notamment celles employées au cours de la Guerre de Sécession en Amérique : évolutions de l’armement, les obus, les canons, le chargement par la culasse, les premières armes à répétition. Un enseignement qui manque aux troupes françaises dont le commandement est l’héritier des stratégies du 1er Empire.

L’offensive victorieuse prussienne est menée par Von Moltke (que l’on retrouvera en 1914 à la tête de l’Armée allemande) et l’on voit l’Armée française s’effondrer en quelques jours en dépit de violents combats, comme à Gravelotte, et une résistance acharnée de plusieurs unités. Il est vrai que dans le même temps des armées entières se laissent enfermer dans des places fortes, sans munitions et sans ravitaillements. Ces armées finissent par capituler, comme celle du général Bazaine à Metz, et l’empereur lui-même qui s’est retranché avec Mac Mahon dans Sedan.

Le 4 septembre 1870, la IIIème République est proclamée sur l’initiative de Léon Gambetta et commence le siège de Paris, qui dure tout l’hiver. Retranchés derrière leurs « fortifs » les Parisiens connaissent misère et famine, mangeant les chevaux, les chiens jusqu’aux animaux du Jardin des Plantes. Sur les étals des bouchers sont vendus chats et rats.

Le 8 février 1871, les élections donnent la majorité aux conservateurs favorables à la cessation de la guerre. Adolphe Thiers ouvre les préliminaires de paix à Versailles. La France perd l’Alsace et la Lorraine, et doit payer 5 milliards de francs or d’indemnités. En gage, l’est de la France est entièrement occupé. Il le sera jusqu’en 1873.

Le 1er mars 1871, les Prussiens entrent dans Paris. 

***

« C’était un soir à la bataille de Reichshoffen

Il fallait voir les cuirassiers charger ».

Dans le nord de l’Alsace, il ne subsiste que très peu de souvenirs du Second empire. Le long de tous les petits chemins de campagne, l’un des rares témoignages de l’époque a survécu. Il s’agit des « bancs de l’impératrice Eugénie ». Ces curieux bancs de grès rouge, surmontés d’un linteau, avaient été créés pour que les paysannes alsaciennes, qui allaient vendre leurs produits aux marchés, puissent s’asseoir un instant avant de reprendre leur route. C’est en suivant ces bancs que j’arrivai dans une petite bourgade du nom de Woerth, se situant entre Haguenau et Wissembourg. Intrigué par le nom du restaurant – « Le Restaurant du Musée » - alors qu’aucun musée n’existait à trente kilomètres à la ronde, je pénétrai les lieux. Plus qu’une traditionnelle auberge alsacienne, je me trouvai dans une grande salle décorée de panoplies et d’équipements militaires français et allemands de la Guerre franco-prussienne. Il y avait aussi des mannequins aux visages de cire, datant certainement de la fin du 19ème siècle. Etaient représentés des zouaves, un turco, un fantassin allemand. Des chasseurs d’Afrique côtoyaient des Uhlans. Et là, juste devant moi, était placé un uniforme de cuirassiers. Les rayons du soleil se reflétaient dans la cuirasse, donnant une flamboyance, une grandeur, à ce dernier mannequin. Je ne savais pas encore que j’avais face à moi l’uniforme de l’un de ces héroïques cavaliers qui chargèrent à Reichshoffen.

Le patron du restaurant, devant ma curiosité, se fit un devoir de me citer chaque unité à laquelle appartenaient les uniformes exposés. Cette collection avait été réalisée par son grand-père, réquisitionné pour enlever les morts. Au lendemain de la charge fameuse, le 6 août 1870, le brave homme avait fait ce que le vainqueur lui commandait et il en profita pour récupérer ce qui pouvait l’être. D’ailleurs, la bataille s’était plutôt déroulée sur la commune de Froeschwiller, Reichshoffen étant le bureau de poste d’où partirent les messages communiquant le résultat de l’attaque.

En tant que passionné par l’Histoire et ancien militaire, je fis tout de même remarquer au patron que son grand-père avait dépouillé des morts de leurs uniformes pour se constituer cette collection. Gêné, l’homme me répondit que l’aïeul avait en fait récupéré les vêtements et les armes dans des bagages laissés à l’abandon. J’acceptai cette explication. Finalement, le Devoir de Mémoire passait peut-être aussi par de tels chemins, même si j’imaginai mal les zouaves ou les prussiens s’encombrer de malles de vêtements ou de cartons à chapeaux sur un champ de bataille.

Tous ces guerriers étaient maintenant figés dans leurs uniformes raidis. Une restauration archaïque avait été réalisée : les tissus avaient été repeints pour leur redonner l’éclat de leurs couleurs. L’empâtement des peintures et les poussières agglutinées leur conféraient une allure de statues aux visages de cire déformés par le temps.

Aujourd’hui, ce restaurant est fermé. Le propriétaire a fait don de sa collection à la ville de Woerth, qui l’expose dans les salles du château. La plupart des pièces ont été restaurées – correctement – et quelques-unes, laissées en l’état témoignent de ce que je vis.

Autour de ce village alsacien, il n’est pas rare de trouver, enfouie sous des ronces, une stèle rappelant qu’en ce chemin, ou ce champ, est tombé un cuirassier ou un Major du 3ème Zouave. Pendant longtemps, les vestiges de la Guerre franco-prussienne ont été soit cachés, soit bousculés puis ensevelis par l’agriculture ou les événements qui ont suivi. Celles qui restent témoignent à jamais qu’en 1870, en ces lieux, s’écrivit un fait d’armes qui n’était plus connu que par une comptine : « C’était un soir à la bataille de Reichshoffen ».

 

*Thierry Gandolfo, ancien sous-officier au 32ème régiment d’Artillerie, est conservateur du cimetière d’Issy-les-Moulineaux et trésorier du Comité local du Souvenir Français.

 

 

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Rédigé par Frédéric-Edmond RIGNAULT

Publié dans #1870-1871

Publié le 4 Avril 2008

 


Le 23 octobre 2007. Rue de la Glacière, chez Monsieur et Madame Pierre Debeaurain.

  

Pierre Debeaurain : « Mon arrière-grand-père, Ernest-Pierre Richard est mort en 1942, à l’âge de 92 ans. Il était donc né en 1850. Habitant de ce qui n’était alors encore qu’un village, Issy, il avait appris à lire et écrire très jeune, grâce à un curé qui avait dû déceler en lui certaines capacités. Lire et écrire, ce n’était pas si courant à l’époque. Comme, de plus, Ernest Richard était très grand et costaud, il eut la chance d’entrer à la Garde personnelle de l’empereur Napoléon III, peu avant la Guerre franco-prussienne».

Il semble qu'Ernest-Pierre Richard ait rejoint une formation particulière : l’escadron des Cent-gardes à cheval. Corps d’élite de cavalerie créé par décret du 24 mars 1854, il est commandé par Lepic puis par le colonel baron Jacques Albert Verly. L’esprit de constitution des Cent-gardes s’inspire des Life Guards anglais. Composé d’un état-major, de deux compagnies de cent quatre-vingt-dix sous-officiers et gardes, l‘escadron ne fait pas partie de la Garde impériale mais est attaché directement à l’empereur.

Sa mission consiste en la protection personnelle de Napoléon III et le service au quotidien dans les palais impériaux, ne rendant les honneurs qu’à l’empereur et sa famille. Une des particularités de ce corps consiste en la taille minimum de chacun des cavaliers : mesurer au minimum 1,80 m !

La tunique s’inspire des cuirassiers : bleu de ciel, culotte blanche, bottes de cuir noir à l’écuyère. Pour la grande tenue, une cuirasse est portée ; elle arbore les grandes armes de l’Empire. L’armement des Gardes comprend un mousqueton et un sabre-lance qui se fixe comme une baïonnette. La solde est particulièrement généreuse : mille francs-or pour les gardes et les trompettes.

En juillet 1870, après des provocations des deux côtés du Rhin, entre autres au sujet de la candidature du prince de Hohenzollern à la couronne d’Espagne – ce qui entraînerait de facto un enveloppement de l’Empire français par des souverains allemands – la France déclare la guerre à la Prusse, soutenue immédiatement par les princes allemands (ce qui accélérera la fondation de l’Allemagne). Le 28, Napoléon III arrive à Metz, suivi des Cent-gardes et prend le commandement de l’armée du Rhin.

Au début du mois d’août, les armées prussiennes envahissent la France et attaquent à Wissembourg ; les batailles se multiplient : Woerth (Froeschwiller pour les Français – la fameuse charge des cuirassiers de Reichshoffen), Spicheren, Borny-Noisseville. La ville de Nancy est occupée. Partout les armées de l’empereur sont bousculées.

Napoléon III se retire de Metz, se dirige vers Verdun puis Châlons-en-Champagne ; à Beaumont, dans les Ardennes, le corps d’armée du général de Failly est mis en déroute. L’empereur s’enferme dans la ville de Sedan. Plusieurs Cent-gardes l’ont suivi et demeurent en permanence à ses côtés.

Pierre Debeaurain : « C’est au moment de la bataille de Sedan que Napoléon III confie à Ernest Richard la mission de sa vie ! Il s’agit de porter des courriers au plus vite à l’impératrice Eugénie – devenue régente – et la maison impériale. Huit jours sont nécessaires à mon aïeul pour se rendre au château de Saint-Cloud et remettre les courriers. Mais il est déjà trop tard. Le siège de Sedan dure moins d’une semaine. L’empereur, acculé dans une ville dévastée par les obus des canons prussiens, fait hisser le drapeau blanc et se rend auprès de Bismarck. La mission d’Ernest Richard n’aura servi à rien. Et je n’ai jamais su les lignes contenues dans ces lettres. Mon arrière-grand-père possédait dans sa maison de la rue Prudent Jassedé une grande armoire. Interdiction formelle nous était faite de l’ouvrir ou de poser la moindre question sur ce meuble, pour nous merveilleux».

L’escadron des Cent-gardes est dissous le 1er octobre 1870, par décret, et versé au 2ème Régiment de marche de cuirassiers ; régiment qui participe activement à la défense de Paris, dans un premier temps face aux Prussiens puis face aux partisans du gouvernement de la toute nouvelle République française, l’empire venant d’être déclaré déchu.

Pierre Debeaurain : « Mon arrière-grand-père n’a plus d’emploi. Il devient Garde national et s’enrôle dans un bataillon parisien. Il s’agit de défendre son pays et venger son honneur. C’était cela l’important : ne pas déposer les armes devant l’ennemi prussien ! Thiers pactise avec la Prusse car faire cesser les hostilités entre les deux pays passe avant toute chose par un désarmement de Paris ».

En avril 1871, Thiers, réfugié à Versailles et élu « Chef du pouvoir exécutif de la République française » monte une armée faite d’anciens prisonniers de la guerre qui s’achève, auxquels il peut ajouter plus de 12.000 hommes dont il dispose. Cette armée est placée sous les ordres de l’ancien vaincu de Sedan : le maréchal de Mac-Mahon. Les combats s’engagent rapidement. Les Prussiens tiennent le Nord et l’Est de Paris ; ils laissent passer les « versaillais ». La butte de Suresnes et l’ouest parisien sont pris assez facilement. Il n’en va pas de même avec le sud. Les partisans de la continuation de la guerre contre la Prusse et les Communards se défendent, rue par rue, maison par maison. Le 26 avril, le village des Moulineaux est occupé par les hommes de Thiers. Puis le fort d’Issy est pris, mais les Communards le reprennent dès le lendemain.

« Les versaillais se permettent tout. Ils brulent les maisons. Avec leurs canons, ils pilonnent les villages du sud de Paris. Ils se livrent à des atrocités. Dans Issy, des barricades sont montées, sur la place de l’église Saint-Etienne, rue de l’Abbé Grégoire également. Beaucoup de bâtiments sont ruinés du fait des bombardements prussiens ; ceux qui sont restés debout sont anéantis par les canons versaillais. Un obus tombe sur le Moulin de Pierre, alors réserve de munitions, et l’explosion qui s’en suit est incroyable de puissance. Le Moulin de Pierre se trouve aujourd’hui à Clamart, mais, à l’époque, il était dans Issy. Notre fort finit par tomber, comme celui de Vanves. Les versaillais entrent alors dans Paris et fusillent tous les meneurs de la Commune. Entre 10.000 et 25.000 personnes, selon les sources, sont passées par les armes. Ce fut une chance inimaginable pour Ernest Richard d’en réchapper.

Je me souviens très bien des histoires et des anecdotes que me racontait mon arrière-grand-père. Par exemple, il faisait tous les jours – parfois plusieurs fois par jour – l’aller-retour, à cheval, entre le Louvre et Issy, rue Prudent Jassedé. Et il rabâchait sans arrêt ses souvenirs de guerre : « D’abord Napoléon III était impressionnant. Tu m’imagines ? J’avais vingt ans et j’étais face à l’empereur. Le neveu de Napoléon Ier ! Napoléon III n’était pas un mauvais bonhomme mais il était mal entouré. Il y avait des orléanistes, des monarchistes, des illuminés. Surtout, il écoutait le dernier qui parlait. Lui était plutôt favorable à la paix. Finalement, c’est sa femme, Eugénie de Montijo qui emporta la décision. Elle était à la tête des partisans de la guerre. En tant qu’Espagnole, cela peut se comprendre. Et puis, l’empereur souvent laissait faire car il était rongé par la maladie : atteint d’un calcul de la vessie, il souffrait mille maux et cela pouvait le laisser anéanti pendant des heures. Mais le plus mauvais était bien Bazaine, qui perdit son armée enfermée dans Metz. Et par sa faute. Uniquement par sa faute. Douze balles que ce traitre aurait dû recevoir ! Douze balles pour avoir sacrifié son armée, la France et notre Honneur».

 

 Portrait d'Ernest-Pierre Richard, après 1870.

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Rédigé par Frédéric-Edmond RIGNAULT

Publié dans #1870-1871