Hommage à Giacomo Signoroni.
Publié le 20 Juin 2010
Au premier plan, de gauche à droite : Giacomo Signoroni ; André Labour, Délégué général du Souvenir Français, général Jean-Claude Ichac.
« Mon cher Signoroni, Mon cher ami...
Non, cela ne va pas!
Dans notre Maison du Combattant, je ne peux pas utiliser l'une de ces formules, sympathiques certes, mais qui ne sont pas à leur place ici. Alors je vous dirais tout simplement:
Mon Adjudant-chef!
Car vous appeler par votre grade marque ce galon que vous avez gagné après plus de quinze ans passés dans la Légion Étrangère. Et que l'on ne voit ici aucune marque d'une quelconque subordination, pour deux raisons : d'abord parce que, avec la fin de la carrière dans « l'active », cette notion disparaît au profit de la camaraderie et de l'amitié, ensuite et surtout, et personne je pense ne me contredira, parce qu'un adjudant-chef de la Légion vaut bien un général de l'armée de l'air!
Vous êtes né en Italie, il y a un peu moins de quatre-vingt-dix ans. Emigré en France, vous vous engagez à la fin de la deuxième guerre mondiale et vous rejoigniez la mythique « 13 », la 13ème Demi-brigade de Légion étrangère, avec laquelle vous êtes très vite appelé à servir en Indochine, où vous allez effectuer trois séjours, où vous serez blessé trois fois, et d'où vous reviendrez avec trois citations, dont une à l'ordre de l'armée, et la prestigieuse médaille militaire. Nous venons d'honorer il y a trois jours, le 8 juin, le souvenir de vos camarades tombés en Indochine à vos côtés, dans ces lieux dont beaucoup ont été oubliés, s'ils n’ont jamais été connus, et où vous vous êtes illustré: Tan-My, Xon-Lon, Kham-Thien. Seul demeure dans notre mémoire collective Diên-Biên-Phù et son terrible siège de 55 jours à l'issue duquel, blessé à votre poste de combat, vous serez contraint à la reddition et fait prisonnier avant de connaître le calvaire des camps Viet Minh jusqu'à votre libération en août 1954. Puis ce sera l'A.F.N. et ce que l'on appelait à l'époque les « opérations de maintien de l'ordre » sur la frontière marocaine, jusqu'en 1961.
Pendant toutes ces années à la Légion, vous aurez été tour à tour voltigeur de pointe, pionnier, cavalier, et même parachutiste, dans la Compagnie para du 3ème Régiment Étranger d'Infanterie. Et à ce sujet je ne résiste pas au plaisir de vous raconter une anecdote personnelle qui devrait vous rappeler bien des souvenirs. Rentrant d'un séjour aux États-Unis, je suis un jour passé dans le sud-ouest, près de Nérac, pour saluer, dans sa retraite très active, mon témoin à notre mariage, le général Paul Arnaud de Foïard, légionnaire et parachutiste. J'avais rapporté d'une visite au PC des Forces Aériennes Stratégiques américaines un beau T-shirt portant la fière devise de ce commandement: « Peace is our profession », « La paix est notre métier », devise soulignant le rôle primordial de la dissuasion dans le maintien de la Paix. Paul, après avoir lu cette devise, a souri et m'a déclaré: « War is mine !», « Moi, mon boulot, c'est la guerre! ». Car c'était un guerrier, qui après avoir été résistant, fait prisonnier, évadé, avait débarqué en aspirant, en Provence, avant de remonter jusqu'aux Vosges, puis de terminer la campagne d'Allemagne avec une blessure, trois citations et la médaille militaire en un trimestre ! Il avait ensuite rejoint en Indochine le 3ème R.E.I., où il fût votre chef. Plus tard il commandera en Algérie le 2ème Régiment Étranger Parachutiste et en métropole la 11ème Division Parachutiste.
Et bien vous aussi, mon Adjudant-chef, comme lui, vous avez été un guerrier, digne de vos grands anciens de Camerone, et comme eux un exemple pour ceux qui aujourd'hui servent sous le képi blanc ou le béret vert, en métropole, outre-mer ou en Afghanistan. Et c'est pourquoi, c'est avec une grande joie et une grande fierté, Adjudant-chef Giacomo Signoroni, Officier de la Légion d'Honneur, que, au nom de notre Député-maire, Monsieur André Santini, ancien ministre, je vous remets ce « Diplôme d'Honneur aux combattants de l'Armée Française, 1939-1945 », signé de Monsieur Hubert Falco, Secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, « en reconnaissance de votre action pour la France », vous qui êtes devenu un de ses enfants il y a bientôt cinquante-cinq ans.
Avec toutes nos félicitations, et notre admiration. »
Général de brigade aérienne (2S)
Jean-Claude Ichac
Président honoraire du Comité
d'Issy-les-Moulineaux du Souvenir Français